Réforme des retraites : l’étape du Sénat ne sera pas non plus une promenade de santé

Réforme des retraites : l’étape du Sénat ne sera pas non plus une promenade de santé

Entre stratégies politiques et gronde populaire, l'examen du projet de réforme des retraite du gouvernement au Palais du Luxembourg s'annonce moins éclatant qu'à l'Assemblée, mais tout aussi délicat.

Réforme des retraites : l’étape du Sénat ne sera pas non plus une promenade de santé
Crédit photo © Vlad Sargu / Unsplash

Autre chambre, autre ambiance. Après un parcours houleux à l’Assemblée nationale, dont les prises de bec entre députés de l’opposition et de la majorité présidentielle ainsi que les milliers d’amendements déposés auront fait obstacle à l’examen du point le plus controversé de la réforme des retraites – le report de l’âge légal à 64 ans – le Sénat, qui a débuté l’examen de la réforme jeudi 2 mars, offrira-t-il pour sa part des débats sur l'ensemble du texte ?

Onze jours de débats

La Chambre Haute du Parlement, qui a jusqu’au 12 mars à minuit pour faire le tour du texte avant que ce dernier ne soit transmis en commission mixte paritaire, promet des débats moins chaotiques que ceux offerts au Palais Bourbon. Sans élus LFI – principalement à l’origine de la montagne d’amendements déposés à l’Assemblée nationale, et de certains coups d’éclats – ni issus du RN, le Sénat devrait s’épargner les affres d’une stratégie d’obstruction parlementaire et avancer plus rapidement sur le contenu de la réforme proposée par le gouvernement.

Débuté hier, l’examen ne sera pas non plus tout à fait une promenade de santé. Avec en toile de fond, une nouvelle journée de mobilisation nationale le 7 mars, dont la CGT appelle à la reconduction, et – quand même - plus de 4.700 amendements sur la table, d’après franceinfo, cette nouvelle étape parlementaire devra aussi composer avec un agenda très serré.

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Sur le fond du texte, le gouvernement compte sur le soutien des Républicains, majoritaires au Sénat, moins divisés que les députés LR, et à l’origine d’une version de la réforme "de compromis", limitant le report de l’âge légal à 64 ans plutôt qu’à 65, mais prévoyant un allongement de la durée de cotisation.

Encore des compromis à trouver à droite

Des terrains d’entente, en particulier sur les droits familiaux et la retraite progressive, seront toutefois à trouver alors que le Sénat tient à ne pas apparaître comme l’antichambre du gouvernement. Il « doit aux citoyens et aux partenaires sociaux un débat sur l'ensemble du texte » a en ce sens déclaré son président Gérard Larcher, dans un entretien accordé jeudi au Figaro.

En commission, les sénateurs ont ainsi proposé une surcote de 1,25% par trimestre maternité ou éducation pour les femmes à partir de 63 ans, et le ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt, a déjà souligné hier que le coût de la mesure était « très important ». La mise en place d’un "CDI Senior", qui prévoit d’exonérer les entreprises des cotisations familiales pour l’embauche de personnes de plus de 60 ans, a aussi été chiffré par le ministre à 800 millions d’euros, alors que l’exécutif tient à maîtriser coûte que coûte le prix d’une réforme, qui trouve son fondement dans la recherche d’un rééquilibrage des finances publiques.

Pour sa part, l’opposition de gauche espère trouver des failles, notamment en s’appuyant sur la gronde populaire, pour amender le projet du gouvernement, et surtout faire tomber le fameux article 7 sur le report de l’âge légal, que le patron des sénateurs socialistes, Patrick Kranner, souhaite examiner après la mobilisation du 7 mars.

L'option de l'article 38

Malgré les bonnes intentions affichées sur les bancs du Palais du Luxembourg pour un débat plus constructif et apaisé, un outil parlementaire pourrait compliquer cette affaire : il s’agit de l’article 38 du règlement intérieur du Sénat, une disposition jusqu’ici jamais utilisée, qui permet de raccourcir les débats en limitant les discussions sur un amendement ou un article à deux interventions de sénateurs d’avis contraire, avant de passer manu militari à un vote. Le dispositif, qui permettrait de raccourcir assez radicalement les débats en limitant fortement le temps de parole de l’opposition, pourrait être brandi par le chef de file du groupe LR, Bruno Retailleau, a-t-il prévenu la semaine dernière.

Mais son utilisation, redoutée par l’opposition de gauche, reste cependant incertaine, et ne fait pas l’unanimité au sein du groupe LR car elle représente un certain risque politique. Alors que le 47.1, qui prévoit un agenda très raccourci, est déjà décrié comme stratégie d’obstruction parlementaire, le recours à l’article 38 par le Sénat serait perçu comme un nouveau coup de pouce de la droite au gouvernement.

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