Réforme des retraites : "C’est 65 ans" mais "on peut discuter"

Réforme des retraites : "C’est 65 ans" mais "on peut discuter"
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Alors que les discussions avec les partenaires sociaux sont dans la dernière ligne droite, la Première ministre a déroulé les grandes lignes de la réforme des retraites souhaitée par le gouvernement.

Réforme des retraites : "C’est 65 ans" mais "on peut discuter"
Crédit photo © iStock

La 3e phase des discussions avec les partenaires sociaux sur la réforme des retraites a démarré jeudi. Entré dans le dur – alors que cette étape concerne l’épineuse question du report de l’âge légal de départ – le gouvernement tient à border le « chemin » des négociations qu’il est prêt à engager d’ici aux fêtes de fin d’année, date limite à laquelle il prévoit de présenter la version alpha de son projet de réforme.

Après Olivier Dussopt, en début de semaine, la Première ministre Elisabeth Borne a pris le relais dans les colonnes du Parisien ce vendredi pour assoir la position officielle du gouvernement dans la dernière ligne droite de ces négociations. Sans annonce surprise.

Une réforme "nécessaire" pour des raisons financières

Premier point – non négociable – en dépit de l’opposition de ses adversaires de la France Insoumise et du RN : la réforme est nécessaire pour assurer un rééquilibrage financier du système actuel dont « le déficit dépassera les 12 milliards d’euros en 2027 et continuera à se creuser si on ne fait rien », avec « plus de 100 milliards d’euros de dette supplémentaire […] dans les dix prochaines années ».

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Avec deux contraintes – « ne pas baisser le montant des retraites ni alourdir le coût du travail par des cotisations supplémentaires » - qui induisent donc d’allonger la durée du travail. La feuille de route, comme l’a indiqué M. Dussopt : un report progressif de l’âge légal de départ à 65 ans d’ici à 2031, mis en place avant l’été prochain, et qui concernera donc les travailleurs nés à partir du 2e semestre 1961.

« Mais s’il y a un autre chemin proposé par les organisations syndicales et patronales qui permette d’atteindre le même résultat, on l’étudiera. On peut discuter », assure la Première Ministre, le président de la République s’étant déclaré favorable en octobre à une concession à 64 ans contre un rallongement de la durée des cotisations, ce dernier scénario étant défendu par les sénateurs LR.

La réforme concernera bien tous les régimes, y compris les spéciaux de « la Banque de France, la RATP, les salariés des industries électriques et gazières (IEG),… » mais en vertu de la clause du grand-père « cela ne concernera que les nouveaux recrutés ».

1.200€ de pension a minima à taux plein

Voilà pour le bâton. Côté carotte, Elisabeth Borne a donné quelques assurances : retraite minimale à 1.200€ pour les carrières complètes, pas d’augmentation de l’âge de l’annulation de la décote, actuellement à 67 ans, un geste en direction des femmes, dont les carrières sont plus hachées que les hommes (temps partiel, congés maternité…).

Également assurés : le maintien du principe des carrières longue, voire son assouplissement « pour ceux qui ont commencé à travailler vraiment très tôt », la prise en compte des périodes de congé parental dans le calcul de la durée de cotisation, ou encore l’amélioration du dispositif de cumul emploi-retraites et la simplification de la retraite progressive avec un mode plus incitatif pour favoriser les temps partiels en fin de carrière, lequel pourrait aussi s’appliquer à la fonction publique.

Des aménagements

Madame Borne se dit également « déterminée à trouver des solutions » pour une meilleure prise en compte de la pénibilité. Ainsi, l'allongement de l’âge de départ concernera « toutes les catégories professionnelles, mais la réforme ne sera pas uniforme, on tiendra compte des situations de départ » assure-t-elle à propos de certains métiers bénéficiant actuellement de départs anticipés.

Pour l’emploi des seniors, enfin, – dont le taux en France est médiocre par rapport à la moyenne européenne* - l’exécutif entend ménager le patronat dans une période où le taux de chômage reste globalement bon et où les entreprises doivent déjà rendre des comptes côté salaires et redistribution de la valeur ajoutée. Pas de sanction prévue à l’encontre des entreprises mais la mise en place d’un « index » sur le modèle de celui de l’égalité hommes-femmes. Pour Elisabeth Borne, « il faut aussi responsabiliser les entreprises » mais cela relève « d’abord du dialogue social dans les entreprises et dans les branches. »

Voilà donc le programme : une réforme non négociable, une fermeté de façade sur l’âge de départ pour arriver à un terrain d’entente plus que nécessaire avec la droite à 64 ans. Des aménagements pour tenter de calmer le jeu sur le principe avec les partenaires sociaux, et donner des garanties sociales réclamées par les centristes et l’aile modérée de Renaissance – clause du grand père, retraites anticipées négociables, bétonnage de la pénibilité, des femmes, des petites retraites etc.

Bras de fer social

Sans grande illusion toutefois d’éviter le bras de fer social, puisque le recul de l’âge de départ demeure la ligne rouge à ne pas franchir à gauche, à l’extrême droite et du côté des syndicats.

Dans ce contexte, trouver une majorité parlementaire sans 49.3 relève un peu de la quadrature du cercle. « Vous passerez par un projet de loi classique ou un projet de loi de finances de la Sécurité sociale rectificatif qui permettrait d’utiliser un éventuel 49.3 ? », demandent nos confrères à la Première ministre. « Chaque chose en son temps, rien n’est tranché. Moi, à ce stade, je me préoccupe surtout du contenu de la réforme. On verra le reste le moment venu. » Après la trêve des confiseurs donc.

*56,8% selon l’OCDE en France pour les 55-64 ans, contre 60,5% en moyenne dans l’Union européenne.

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