Inégalités : une aggravation inquiétante ?

Inégalités : une aggravation inquiétante ?
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Selon un rapport, les inégalités de revenus et de patrimoine se sont creusées ces dernières décennies et pourraient s’accroître à l’avenir en l’absence de mesures fortes.

Inégalités : une aggravation inquiétante ?
Crédit photo © Reuters

Un monde moins juste. Tel est le constat établi par le World Inequality Lab, une publication réalisé par un groupe de chercheurs* à partir des travaux des chercheurs affiliés à WID.World (base de données mondiale sur le patrimoine et les revenus).

Des revenus plus concentrés

Ce travail montre que la concentration des revenus s’est amplifiée dans toutes les régions du monde depuis 1980. En Russie par exemple, les 10% d’individus les plus aisés captent aujourd’hui 46% du revenu national contre à peine plus de 20% au début des années 80. En Amérique du Nord, cette même part est passée sur la période de 34% à 47%.

Des variations contrastées

Les niveaux d’inégalités et leur évolution restent toutefois très variables d’une zone à l’autre. Au Moyen-Orient, région jugée la plus inégalitaire, le décile de population le plus riche perçoit 61% du revenu national. En Europe de l’Ouest, la proportion se limite à 37%. De surcroît, cet indicateur d’inégalités a bien moins progressé en Europe (+5 points depuis 1980) que dans le reste du monde.

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Le focus réalisé sur le centile supérieur (1% du haut) en donne un aperçu évident. En Europe de l’Ouest, la part de revenu du centile supérieur est passée de 10% à 12%. Aux Etats-Unis, elle est aujourd’hui de 20% contre 11% il y a 37 ans.

Le patrimoine dans la même tendance

Les auteurs se sont aussi penchés sur la répartition du patrimoine… depuis 1913. Globalement, il apparaît que les inégalités ont décliné jusqu’aux années 1980 avant de rebondir. En France, le centile le plus riche détenait par exemple 55% du patrimoine des ménages en 1913. Un chiffre qui est tombé à près de 15% au milieu des années 1980 avant de remonter autour de 22% actuellement.

La privatisation du capital en cause ?

Pour expliquer ces évolutions, les auteurs de l’étude mettent en avant l’évolution du partage des richesses entre privé et public. Depuis les années 1970, la valeur du capital privé a progressé dans toutes les régions du monde. A l’inverse, le montant du capital de la sphère publique a chuté, devenant même négatif au Royaume-Uni et aux Etats-Unis compte tenu du poids de la dette des Etats.

« Cette situation limite vraisemblablement la capacité d’action des Etats contre les inégalités, et elle a assurément des conséquences importantes pour les inégalités de patrimoine entre individus », souligne les auteurs.

Quel avenir ?

Pour le futur, l’étude établit plusieurs scénarios. Les plus sombres pointent un risque de creusement accru des inégalités, notamment si tous les pays suivent la trajectoire passée des Etats-Unis.

Mais l’étude se veut aussi optimiste en soulignant que les inégalités pourraient être réduites dans un scénario où tous les pays adopteraient à l’avenir la trajectoire européenne. La moitié la moins aisée de la population capterait ainsi 13% des revenus en 2050 contre10% aujourd’hui.

Des mesures politiques

D’après les auteurs, tout dépendra des choix politiques. Selon eux, la réduction des inégalités passera par la généralisation de l’impôt progressif, la lutte contre l’évasion fiscale (via un registre mondial des actifs financiers), l’amélioration de l’éducation et l’investissement des états.

Bien entendu, les auteurs précisent que cette analyse ne reflète que leur point de vue. Un point de vue qui fera sans aucun doute débat.

*Personnes ayant participé à l'étude : Facundo Alvaredo, Lucas Chancel, Thomas Piketty, Emmanuel Saez, Gabriel Zucman, Thomas Blanchet, Richard Clarke, Leo Czajka, Luis Estevez-Bauluz, Amory Gethin, Wouter Lenders

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