Impôts : pourquoi a-t-on eu droit à un débat sur les « loyers implicites » ?

Impôts : pourquoi a-t-on eu droit à un débat sur les « loyers implicites » ?

Le gouvernement a démenti une rumeur lui prêtant l’intention d’imposer les loyers économisés par les propriétaires. Une affaire née d’un rapport du Conseil d’analyse économique

Impôts : pourquoi a-t-on eu droit à un débat sur les « loyers implicites » ?
Crédit photo © Reuters

L’affaire a enflé récemment sur les réseaux sociaux. Et en réponse à une question du député Charles de Courson, le secrétaire d’Etat au budget a clairement démenti la rumeur cette semaine. Non, le gouvernement n’a pas pour projet de taxer les loyers implicites et ne soutiendrait pas une telle mesure si elle était présentée par un parlementaire, a assurée Christian Eckert.

Mais qu’entend-on au juste par « loyers implicites » ? Appelés aussi « loyers fictifs », ils désignent les loyers qu’économisent les propriétaires par rapport aux locataires. En d’autres termes, grâce à son patrimoine immobilier, un propriétaire dispose d’un revenu résiduel plus important que s’il était locataire. C’est ce différentiel de revenus qui constitue le loyer fictif.

Un revenu du capital exonéré

On peut aussi voir la question sous l’angle de l’investissement. Imaginons un foyer ayant 50.000 euros de revenus et payant 10.000 euros d’impôt (au taux unique de 20% pour simplifier le cas). Si ce ménage dispose du capital nécessaire pour acheter sa résidence principale, il ne déboursera aucun loyer et son revenu net sera de 40.000 euros.

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Prenons maintenant un foyer aux revenus et au capital similaires mais qui décide de louer son logement et d’investir son capital dans un placement financier. Si son loyer est de 10.000 euros par an, son revenu sera de 30.000 euros après impôt et loyer. Par ailleurs son placement va lui rapporter des intérêts. Si le rendement est égal au rendement immobilier, ce revenu supplémentaire sera de 10.000 euros. Mais fiscalité du capital oblige, ce revenu sera taxé : à hauteur de 2.000 euros si le taux est de 20%. Bref, ce foyer n’aura « que » 38.000 euros de revenu global après impôt, soit moins que le ménage propriétaire.

Un rapport du CAE au cœur du débat

C’est ce qu’a souligné le Conseil d’analyse économique (CAE) dans un rapport sorti il y a plus de 2 ans mais qui a resurgi sur les réseaux sociaux récemment. Le CAE estime dans ce document que le loyer implicite est un revenu du capital qui profite d’un avantage fiscal par rapport à d’autres supports d’investissement. En clair, pour le CAE, les loyers économisés constituent un revenu du capital injustement exonéré d’impôt et cela pénalise l’investissement.

C’est donc selon lui, dans un souci d’harmonisation de la fiscalité, que le CAE a suggéré de taxer les loyers implicites (en autorisant en retour la déduction des intérêts pour les accédants). Une idée qui n’a pas manqué de provoquer un tollé, dans un pays qui compte 58% de propriétaires. Certains ont notamment souligné le caractère beaucoup plus complexe du dossier, les propriétaires supportant déjà des charges supplémentaires comme la taxe foncière et la possession d’autres biens (une automobile par exemple) pouvant aussi procurer des revenus fictifs.

Notons en tout cas qu’une taxation de ces revenus fictifs n’aurait pas constitué une véritable innovation. Des dispositifs comparables existent à l’étranger et comme l’a rappelé Charles de Courson, les loyers implicites ont été imposés en France de 1914 à 1965…

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