Prélèvement à la source : « le cas de la rémunération des enfants »

Prélèvement à la source : « le cas de la rémunération des enfants »

Olivier Rozenfeld, président de Fidroit et Brice Laurent, consultant chez Fidroit

Prélèvement à la source : « le cas de la rémunération des enfants »
Crédit photo © Fidroit

La rémunération perçue par un étudiant ou élève est imposable à l’impôt sur le revenu en qualité de traitements et salaires, avec cependant deux exceptions légales.

Les indemnités de stage versées par une entreprise et les salaires des apprentis bénéficient d’une exonération dans la limite du montant annuel du Smic. Cette règle vaut que le stagiaire ou apprenti soit ou non rattaché au foyer fiscal de ses parents.

Les salaires versés à un élève ou étudiant âgé de 25 ans au plus au 1er janvier de l’année d’imposition en rémunération d’activités exercées pendant leurs études secondaires ou supérieures (ou durant leurs congés) sont, sur option des intéressés, exonérés dans la limite de 3 fois le Smic mensuel. Cette règle s’applique indistinctement en cas de rattachement ou non au foyer des parents. L’exonération peut être cumulée au titre d’une même année avec celle pour les indemnités de stage.

Comment alors appliquer ces principes dans le cadre de l’entrée en vigueur du prélèvement à la source (PAS) au 1er janvier 2019 ? Comment définir l’assiette et le taux du prélèvement ?

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Application à l’assiette

La loi soumet à la retenue à la source et non à l’acompte les revenus soumis à l’IR suivant les règles applicables aux salaires.

L’administration précise l’assiette pour les rémunérations des apprentis et des stagiaires. Compte tenu de l’existence d’une limite d’exonération, seule la partie excédant cette limite est soumise à la retenue à la source, qui s’applique alors dans les conditions de droit commun. L’administration admet qu’à titre de simplification, le montant du Smic en vigueur au 1er janvier de l’année peut être utilisé pour les retenues à la source réalisées au cours de cette même année.

Exemple

Un jeune contribuable est en apprentissage chez un employeur pendant 12 mois (du 1er janvier au 31 décembre 2019) et perçoit une gratification nette mensuelle imposable (avant déduction pour frais professionnels) de 1.850 €.

Pour les besoins de l’exemple, la limite annuelle d’exonération de cette gratification est supposée être de 17.000 €.

L’employeur ne prélèvera pas de retenue de janvier à septembre 2019. Il prélèvera une retenue sur une assiette de 1.500 € en octobre, puis une RAS sur une assiette de 1 850 € en novembre et en décembre.

Attention, en cas de pluralité de contrats, chaque employeur ne peut connaître l’ensemble des rémunérations versées au cours de l’année, chacun d’eux apprécie séparément la fraction excédant le plafond d’exonération afin de l’assujettir, le cas échéant, à la retenue.

L’administration précise que lorsqu’une personne est, au cours d’une même année, employée dans le cadre d’un contrat d’apprentissage et dans le cadre d’une convention de stage, la limite d’exonération s’applique à la fois pour le contrat et pour la convention.

Première conclusion : pour les stagiaires et apprentis, il n’y a donc pas de retenue tant que le revenu ne dépasse pas la limite d’exonération.

L’administration précise ensuite que l’intégralité des rémunérations versées aux étudiants est prise en compte dans l’assiette de la retenue, sans qu’il soit fait application de l’exonération dans la limite de 3 fois le smic mensuel.

Ceci résulte du fait que l’exonération s’applique sur option du bénéficiaire lors du dépôt de la déclaration des revenus, le caractère non imposable des sommes ne peut donc pas être établi dès leur paiement.

Notons qu’en matière d’assiette, il existe une règle légale spécifique aux contrats courts (contrat de moins de deux mois ou dont le terme est imprécis) prévoyant l’application d’un abattement égal à la moitié du Smic mensuel.

L’administration rappelle que cette règle particulière d’assiette peut tout à fait s’appliquer aux revenus des étudiants (avec application du taux par défaut, voir ci-après).

Deuxième conclusion : pour un étudiant, il y a retenue sur son salaire (sur une assiette réduite s’il s’agit d’un contrat court), alors même que cette rémunération pourra être exonérée d’IR par la suite si elle ne dépasse pas 3 fois le Smic mensuel.

Application au taux

A ce stade, s’engage alors une autre étape du raisonnement : la détermination du taux applicable.

Beaucoup de stagiaires, apprentis, élèves ou étudiants font partie du foyer fiscal de leurs parents. Or, la loi prévoit l’application obligatoire du taux neutre aux revenus des personnes qui ont été à charge ou rattachées au titre de la dernière année pour laquelle l’impôt a été établi.

L’administration va dans le même sens puis précise que par conséquent, le taux propre au foyer de rattachement n’est pas applicable pour ces personnes et qu’aucun taux spécifique n’est calculé pour elles. Elle commente ensuite le traitement selon qu’il y a maintien ou non du rattachement.

Exemple

Un enfant âgé de 20 ans est embauché en CDI le 1er janvier 2019 et était rattaché au foyer fiscal de ses parents au titre de l’imposition des revenus des années 2017 (N-2) et va l’être au titre des revenus de 2018 (N-1).

L’administration ne transmet pas de taux de prélèvement à l’employeur, qui applique la grille de taux par défaut toute l’année 2019.

L’imposition des revenus de 2019 sera déclarée en 2020. Si l’enfant maintient son rattachement au foyer fiscal de ses parents, la retenue à la source collectée au cours de 2019 (avec le taux par défaut) s’imputera sur l’IR dû in fine par ce foyer fiscal.

L’administration continuera à ne transmettre aucun taux à l’employeur de l’enfant rattaché.

En revanche, si au titre de 2019 (déclaration de 2020), l’enfant effectue une déclaration de revenus en son nom propre, le montant prélevé à la source au cours de l’année 2019 (avec le taux par défaut) s’imputera sur son impôt sur le revenu, liquidé à l’été 2020.

L’administration calculera suite à cette déclaration un taux de prélèvement propre à l’enfant qui sera, le cas échéant, communiqué à l’employeur et appliqué aux revenus versés à compter de septembre 2020.

Dans le cas de contrats courts, il y aura cependant application du taux par défaut même lorsque l’enfant ne faisait déjà plus partie du foyer fiscal IR de ses parents en année N-2 et N-1.

Troisième conclusion : le taux appliqué dépend du foyer fiscal constitué et de la durée du contrat.

La fiscalité française n’est pas un art divinatoire et peut sembler inintelligible aux profanes.

Le PAS, censé simplifier la vie des contribuables, risque d’être vécu par de jeunes populations comme le début d’un parcours fastidieux et d’une relation complexe avec l’administration.

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Olivier Rozenfeld

Le parcours d'Olivier Rozenfeld

Président, Fidroit

Diplômé du DESS en Gestion de Patrimoine de Clermont-Ferrand, Olivier Rozenfeld est Président du groupe Fidroit depuis 1998, société au sein de laquelle il est entré en 1995.

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