Stéphane Absolu, directeur du pôle d’expertise patrimoniale de Cyrus Conseil
Le Projet de Loi de Finances pour 2018 prévoit la mise en place d’un Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) sur les revenus du patrimoine et notamment sur les plus-values de valeurs mobilières.
Ce prélèvement comprend à la fois une imposition sur le revenu au taux forfaitaire de 12,8% et des prélèvements sociaux de 17,2%, soit un taux d’imposition globale de 30%. La donne pourrait paraître simple si le mécanisme de ce PFU ne venait pas se superposer avec le choix offert aux contribuables d’opter pour une imposition à l’impôt sur le revenu au barème progressif, en conservant la plupart des régimes actuelles et des abattements (40% pour les dividendes ; 50%, 65% voire 85% pour les plus-values).
L’objectif de cette superposition est de fixer un taux d’imposition plafond à 30% (taux du PFU) tout en permettant à ceux qui pourraient y prétendre de bénéficier dans le cadre d’une imposition au barème progressif d’un taux de fiscalité inférieure. Il s’agit principalement des contribuables bénéficiant des tranches bases d’imposition de 14 et 30%.
Malgré une fiscalité plus favorable, tout le monde n’est pas gagnant
Les gagnants sont les épargnants qui subissaient une fiscalité élevée sur les revenus de leur patrimoine et notamment des plus-values : pour certains le gain pourra représenter jusqu’à 50% !
Le plus surprenant est que l’investissement à court terme sort gagnant de cette réforme : en effet, les plus-values à court terme bénéficient d’une baisse plus forte, passant d’un taux d’imposition de 60,5% à 30% (pour des revenus taxés actuellement dans une tranche d’imposition à 45%).
Ainsi, la prime à la détention longue des titres qui permettait par l’effet des abattements de donner un cercle vertueux à la détention dans la durée des actions cotées ou non, disparaît à partir de 2018. Si l’intention n’est pas exprimée, on pourrait y voir une incitation à la spéculation, l’investisseur de 2 ans ou de 10 ans subissant le même taux d’imposition de 30%.
Les perdants sont les chefs d’entreprise cédant et partant à la retraite, qui dans l’hypothèse où ils ne pourraient pas bénéficier du régime de créateur d’entreprise, perdent le bénéfice de leur abattement de 85% sur la plus-value. Ainsi ces derniers se retrouvent comme tout épargnant à bénéficier du PFU après un abattement fixe de 500 000€, ou du régime d’abattement de droit commun. On constatera donc demain pour cette catégorie de chef d’entreprise détenant leur titre depuis plus de 8 ans, un taux de taxation qui passera de 22,5% à 30%, soit 7,5 points de plus de fiscalité !
Enfin, les contribuables de la tranche basse à 14% pour qui la réforme n’a aucun effet sur la fiscalité vont conserver les taux d’imposition à l’impôt sur le revenu qui étaient les leurs jusqu’à maintenant.
Plus que jamais, l’ingénierie patrimoniale est nécessaire pour optimiser la gestion de son patrimoine
Le principe devient l’imposition au PFU sauf option pour le barème progressif de l’impôt sur le revenu.
Cette option serait une option générale applicable à l’ensemble des revenus du patrimoine sur l’année, il appartiendra donc aux contribuables de déterminer laquelle de ces deux options leur sera plus favorable. C’est ainsi mettre le contribuable face à des choix et à l’obligation de se poser les bonnes questions, et par conséquent conserver l’ingénierie au cœur des stratégies patrimoniales.
Notons également que ce taux d’imposition plafond de 30% revient à faire un bond en arrière de 10 ans, la fiscalité des plus-values en 2009 s’élevait alors à 30,1%.
En fonction des objectifs fixés, les stratégies de transmission familiale, d’apport à une société holding ou à un fonds de dotation, restent donc au cœur des réflexions des patrimoines les plus importants pour anticiper l’impact fiscal de ces opérations le plus sereinement possible.