« Organiser des transmissions intergénérationnelles avec la souscription démembrée d’un contrat d’assurance vie »

« Organiser des transmissions intergénérationnelles avec la souscription démembrée d’un contrat d’assurance vie »

Tribune de Valérie Bentz, responsable des études patrimoniales de l’Union financière de France (UFF).

« Organiser des transmissions intergénérationnelles avec la souscription démembrée d’un contrat d’assurance vie »
Crédit photo © UFF

Le principe des transmissions intergénérationnelles avec démembrement de propriété consiste à réinvestir sur un contrat d’assurance vie des fonds provenant de la vente de biens préalablement démembrés à la suite d’une succession ou d’une donation notariée. Cette solution permet de concilier les avantages du démembrement initial avec ceux de l’assurance vie.

Prenons l’exemple de Madame M, divorcée, qui a une fille (Anne) et des petits enfants. Madame M est propriétaire d’un appartement. Elle décide de donner la nue-propriété de son appartement à sa fille Anne et d’en conserver l’usufruit. Quelques années plus tard, Madame M et sa fille décident de vendre cet appartement et conviennent, ensemble, de replacer ces fonds sur un contrat d’assurance vie.

Clause bénéficiaire

En présence de plusieurs enfants, il faudra faire un contrat par enfant nu-propriétaire. Dans le cas présent, Madame M sera co-souscriptrice et « usufruitière ». Sa fille Anne sera co-souscriptrice et « nu-propriétaire », elle sera aussi l’assurée du contrat. La clause bénéficiaire devra prévoir 2 cas au décès d’Anne. Le premier, le plus probable, est celui selon lequel Madame M décède avant sa fille Anne : les enfants d’Anne sont désignés comme bénéficiaires. Dans le deuxième cas, Anne décède en premier (avant sa mère) : sont désignés comme bénéficiaires du capital décès les enfants d’Anne pour la nue-propriété et madame M pour l’usufruit. La signature des 2 co-souscriptrices est requise pour l’ensemble de la clause.

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Comment fonctionne le contrat, du vivant des deux co-souscripteurs ?

Madame M pourra disposer librement, sous sa seule signature, des gains du contrat en effectuant les rachats correspondants. La condition étant que le rachat ne vienne pas réduire le capital investi initialement. En revanche, Anne ne pourra faire aucun rachat sans l’accord de sa mère.

Le rachat total ou partiel, diminuant la valeur du capital investi, sera possible mais nécessitera l'accord de l'usufruitière et de la nue-propriétaire. Si les fonds issus du rachat sont destinés à être replacés, il conviendra de le faire sur un actif démembré, afin de respecter les droits de chacune. Mais il sera aussi possible (toujours sous réserve de l’accord de Madame M et sa fille) de verser l’intégralité des sommes à l’usufruitière (Madame M) au titre d’un quasi-usufruit.

Les reversements seront possibles, sous réserve que les fonds proviennent du remploi de sommes issues de la vente d’un bien démembré dans les mêmes conditions (Anne : nu-propriétaire, Madame M : usufruitière).

Afin de gérer ce contrat d’assurance vie (arbitrage, rachats, modification de la clause bénéficiaire, etc.) et de respecter les droits de chacune, une convention détaillant les modalités de fonctionnement sera mise place entre l’assureur et les 2 co-souscripteurs.

Transmission intergénérationnelle

Madame M continue de percevoir les revenus de ce capital, si elle le souhaite, toute sa vie durant. Au décès de Madame M, sa fille Anne disposera librement du capital acquis par le contrat. Elle pourra ainsi conserver le contrat initialement souscrit avec sa mère, sans avoir à replacer les fonds sur un autre contrat d’assurance vie.

Au décès d’Anne, ses enfants (petits-enfants de Madame M) récupéreront les capitaux décès restants et profiteront des avantages de la fiscalité au décès applicable à l’assurance vie, notamment de l’abattement de 152.500€* chacun (tous contrats confondus souscrits par Anne au profit de ses enfants), dans la mesure où le contrat à l’origine a été mis en place, alors que leur mère (Anne) avait moins de 70 ans.

Anne pourra alors même, après le décès de sa mère, modifier la clause bénéficiaire et désigner ses petits-enfants (3ème génération et arrière-petits-enfants de Madame M) bénéficiaires pour un pourcentage du capital. Ils profiteront alors eux aussi, de l’abattement de 152.500€. Et voilà comment un contrat d’assurance vie peut devenir un outil de transmission intergénérationnelle.

Qu’en est-il en cas de décès prématuré d’Anne avant sa mère ?

Le contrat, souscrit avant les 70 ans d’Anne, est dénoué (le 990I du CGI s’applique). Chacun des binômes constitués d’un des petits-enfants et de leur grand-mère sera fiscalisé en répartissant sa part de capital décès et son abattement de 152.000 euros en fonction de la valeur fiscale de l’usufruit (déterminée sur la base de l’âge de leur grand-mère).

Imaginons alors que les fonds n’aient pas été remployés en assurance vie mais en SCPI. Dans ce cas du prédécès d’Anne, la mécanique de répartition au sein des binômes (grand-mère et chacun des petits enfants) reste identique afin de calculer la valeur fiscale de l’usufruit. En revanche, la taxation s’effectuera uniquement sur la valeur de la nue-propriété transmise aux petits enfants au décès de leur mère au-delà de 100.000€ par enfant. Par conséquent, plus leur grand-mère sera jeune, plus la valeur fiscale de l’usufruit sera élevée et la nue-propriété faible ce qui peut fiscalement s’avérer plus avantageux comparé au remploi en assurance vie.

a savoir

Notons qu’il n’est pas dans la logique des choses que les enfants prédécèdent à leurs parents, mais, le calcul doit être réalisé notamment en cas de capitaux importants alors que les parents et grands-parents sont encore relativement jeunes, afin de les avertir du risque et d’en mesurer fiscalement l’impact.

©2022-2024
L'Argent & Vous
Valérie Bentz

Le parcours de Valérie Bentz

Responsable des études patrimoniales, UFF

Valérie Bentz débute sa carrière comme inspecteur général chez Allianz France en charge des pôles patrimoniaux. Elle entre à la direction de la distribution d'Axa en 2008 pour y développer le métier de conseiller en gestion de patrimoine.En 2011, Valérie Bentz rejoint l'UFF, en tant que directeur d'agence pour la région IDF Nord. Elle y développe la productivité individuelle de chaque conseiller et recrute de nouveaux talents dans le conseil en gestion de patrimoine. Depuis 2017, elle occupe le poste de responsable du département des études patrimoniales.

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