"Pour être accepté, l'impôt doit être compris..."

"Pour être accepté, l'impôt doit être compris..."
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Olivier Rozenfeld, président de Fidroit, société de conseil aux professionnels du patrimoine

"Pour être accepté, l'impôt doit être compris..."
Crédit photo © Fidroit

Président de Fidroit, société de conseil aux professionnels du patrimoine, Olivier Rozenfeld déplore dans un entretien à L'Argent & Vous les contradictions de la dernière réforme fiscale.

Quel est votre sentiment général face au nouveau cadre fiscal ?

O.R. : Ce qui marque avant tout, c'est l'instabilité fiscale réelle et ressentie. Entre le projet de départ et le texte adopté, les modifications ont été nombreuses avec en parallèle une information qui a tendance à circuler de plus en plus vite. D'où une certaine confusion, renforcée par la possibilité de nouvelles évolutions au travers des lois de finances rectificatives. Aujourd'hui, les décisions d'investissement ne peuvent plus s'inscrire dans la durée.

En parallèle, nous notons un fort sentiment d'incompréhension entre le législateur et les chefs d'entreprises. La contribution croissante qui leur est demandée est vue comme un facteur de découragement avec à la clé le risque d'une moindre création de richesse. C'est ce qui explique que certains regardent ailleurs s'il n'existe pas un environnement plus favorable.

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Enfin, nous remarquons que cette réforme sous-tend un durcissement évident de la fiscalité lorsque l'on passe de l'environnement professionnel à l'environnement privé.

Qu'entendez-vous précisément sur ce dernier point ?

O.R : Le cadre plus contraignant appliqué au dividende en est un exemple. Or, le dividende est un élément de l'environnement professionnel qui vient alimenter le patrimoine privé. Le phénomène est le même avec les plus-values. Ce durcissement nous paraît contradictoire avec la volonté affichée d'orienter l'épargne vers les entreprises. Cela ne va pas aider à réconcilier les Français avec les actions. Et ce n'est pas la seule contradiction de cette réforme.

Quelles sont ces contradictions que vous dénoncez ?

O.R. : Dans le cas d'une plus-value réalisée sur des titres de société, l'épargnant sera généralement moins bien traité que le chef d'entreprise. En revanche, en matière de dividende, la taxation du chef d'entreprise non salarié (soumis aux cotisations sociales) sera plus lourde que celle de l'épargnant. Or, l'épargnant n'est ici qu'un rentier tandis que le chef d'entreprise crée des richesses. Le législateur ne traite plus le dividende de l'entrepreneur non salarié comme un revenu du capital mais comme une rémunération. Mieux vaut donc dans ce cas être épargnant. La soumission des dividendes aux cotisations était normalement destinée à traiter le cas des professions libérales qui privilégiaient la rémunération de l'activité par les dividendes. Mais cette mesure va s'appliquer à tous les dirigeants, y compris ceux qui utilisent le dividende uniquement comme un élément de retour sur le capital. On a fait d'un cas particulier une généralité.

Vous êtes également critique sur le traitement réservé à l'immobilier...

O.R. : L'immobilier montre une autre contradiction. D'un côté on a voulu accélérer la mise en vente de biens en offrant un abattement, mais de l'autre on a créé une nouvelle taxe subordonnée au volume pour éviter que l'abattement ne soit trop favorable. Où est la logique ? Finalement, le Conseil constitutionnel ayant censuré l'article 15, les opérations réalisées en 2013 seront davantage taxées, ce qui est contraire à l'objectif initial. Cela va mettre un coup d'arrêt au marché. Cet exemple montre bien qu'à force de rafistolages, l'ensemble de la loi de finances a perdu en cohérence. Or, pour accepter l'impôt, le contribuable doit d'abord le comprendre.

Le gouvernement a promis la stabilité fiscale jusqu'à la fin du quinquennat. Est-ce de nature à rassurer ?

O. R. : Nous sommes abreuvés de promesses dont on sait qu'elles ne pourront pas être tenues. L'Europe nous attend non pas sur le respect des 3%, mais sur notre capacité à prendre des mesures structurelles d'assainissement. On sait désormais que nous ne tiendrons pas l'objectif de 3%, notamment du fait des mesures qui ont été retoquées et par un manque de croissance. Dès lors, dans la logique fiscale actuelle, d'autres mesures devront être adoptées. Il faut également souligner que le gouvernement a projeté une grande réforme de l'épargne qui est encore à venir et qui concernera en particulier l'assurance-vie.

Quelles pistes faudrait-il suivre aujourd'hui selon vous ?

O.R. : Les autorités n'envisagent la résolution des problèmes que par la réponse fiscale. Or, le meilleur moyen de retrouver de la croissance n'est pas de faire de la fiscalité mais de produire. La loi de finances 2013 crée un choc fiscal qui va contrarier le choc de compétitivité ambitionné.

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L'Argent & Vous
Olivier Rozenfeld

Le parcours d'Olivier Rozenfeld

Président, Fidroit

Diplômé du DESS en Gestion de Patrimoine de Clermont-Ferrand, Olivier Rozenfeld est Président du groupe Fidroit depuis 1998, société au sein de laquelle il est entré en 1995.

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