Les milliardaires paient proportionnellement moins d’impôt que les autres

Les milliardaires paient proportionnellement moins d’impôt que les autres
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Les 75 foyers français les plus riches sont imposés en moyenne à 26% de leurs revenus globaux. La raison : la composition de leur "patrimoine" financier, qui dépasse la sphère "personnelle" et provient essentiellement des sociétés qu'ils contrôlent.

Les milliardaires paient proportionnellement moins d’impôt que les autres
Crédit photo © iStock

Une étude de l’Institut des politiques publiques (IPP), réalisée sur la base d’une méthodologie inédite rapprochant les déclarations de revenus des particuliers à celles fiscales des sociétés, montre que les 75 Français les plus riches (le top 0,0002%), soit les "milliardaires", ne sont imposés en moyennes qu’à 26%... contre 46% pour les 0,1% les plus riches !

« Ce résultat s’explique par un changement dans la composition des revenus au sommet de la distribution, expliquent les auteurs de l’étude. Ceux-ci passent d’une majorité de revenus imposables à l’impôt sur le revenu à une majorité de revenus sous la forme de bénéfices de sociétés non distribués aux foyers fiscaux qui les contrôlent, imposables à l’impôt sur les sociétés », dont le taux est moins élevé (25% aujourd’hui, et 33,33% en 2016, date des données de l’enquête) que celui du revenu et du patrimoine personnels.

Revenu fiscal vs. bénéfices des sociétés

« En conséquence, les taux d’imposition effectifs à l’impôt sur le revenu diminuent en pourcentage du revenu économique global (qui comprend donc les bénéfices des sociétés contrôlées par les foyers fiscaux, par opposition au simple revenu fiscal NDLR)* pour atteindre environ 2% parmi le top 0,001 % », montre l’étude, qui constate une « forte régressivité du taux d’imposition global » à partir du seuil des 0,1% de Français les plus riches, soit parmi les 37.800 foyers enregistrant plus de 627.000€ nets de revenus annuels.

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Les bénéfices non distribués des sociétés que les foyers contrôlent, sont par exemple plus faiblement taxés que les dividendes (flat tax de 30%) distribués aux actionnaires ou que les revenus imposés à l'IR (45% pour la tranche supérieure à 168.994€ + contribution supplémentaire exceptionnelle sur les hauts revenus de 3% ou 4% à partir de 250.000€ de revenu fiscal pour un foyer célibataire ou à partir de 500.000€ pour un couple).

Ces bénéfices imposés à l'IS sont considérés par les auteurs de l'étude comme « de vrais profits », et non « de la fortune virtuelle comme la valeur des entreprises cotées en bourse ». Les intégrer comme éléments constitutifs du patrimoine financier des grandes fortunes - vu leur importance (l'étude montre que ces bénéfices sont deux fois supérieurs à leurs revenus fiscaux) - apparaît opportun, mais on rappellera que ces bénéfices n'arriveront pas forcément dans les poches de ces foyers, dans la mesure où ils sont réinvestis.

Taxer les actionnaires au contrôle des entreprises ?

La tendance à la "régressivité de l'impôt" chez les hauts revenus n’est pas une exception française et s’observe également dans d’autres pays où des enquêtes similaires ont été réalisées, comme aux Pays-Bas ou en Suède.

L’IPP considère que l’imposition sur la fortune s’est avérée inefficace en France pour lutter contre ce phénomène, car le plafonnement de l’ISF à un certain pourcentage du revenu personnel (une contrainte imposée par le Conseil constitutionnel en 2012) n’a pas pu permettre d’élargir cette taxation aux revenus non distribués.

Pour rectifier le tir et augmenter la contribution des ultrariches, l’IPP avance la piste d’une taxation spécifique des actionnaires personnes physiques résidents en France « sur l’ensemble des résultats non distribués par les entreprises contrôlées ». Une solution qui pourrait toutefois se heurter à des limites constitutionnelles, et qui demanderait donc d’établir « une définition convaincante de ce qu’est un revenu non distribué, mais effectivement contrôlé, et donc à la libre disposition du contribuable ».

*L'IPP ajoute au revenu fiscal les pertes et profits non distribués des sociétés contrôlées par des foyers fiscaux (qu'ils détiennent au moins à 10%), au prorata de leur détention effective.

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