Un après-Pinel est-il vraiment possible ?

Un après-Pinel est-il vraiment possible ?

Une mission confiée à l'Inspection générale des finances estime que le développement de nouveaux fonds pourrait permettre de continuer à diriger l’épargne des ménages vers le logement intermédiaire.

Un après-Pinel est-il vraiment possible ?
Crédit photo © Pitch Promotion

Dans la perspective des projets du gouvernement de réduire progressivement les avantages fiscaux du Pinel avant une possible extinction de ce dispositif favorisant l’investissement locatif dans les logements collectifs neuf en 2024, un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) vient de rendre ses conclusions. Ce rapport très détaillé recommande le développement de logements intermédiaires grâce à la mobilisation d’investisseurs institutionnels (sociétés d’assurances, fonds d’investissement, fonds de pension…). Ce rapport évalue en effet le besoin entre 180.000 et 420.000 logements locatifs intermédiaires sur une décennie.

Pinel et logements intermédiaires

A première vue, le rapport entre Pinel et logements intermédiaires ne saute pas forcément aux yeux. Conçu pour les ménages qui ont des difficultés pour se loger dans les grandes villes mais dont les revenus sont trop élevés pour bénéficier des logements sociaux, le logement intermédiaire bénéficie de loyers plafonnés, généralement inférieurs de 10 à 15% aux prix du marché.

Les logements intermédiaires sont situés dans les zones les plus tendues (A bis, A ou B1) et sont soumis aux mêmes plafonds de loyers et de ressources que le dispositif Pinel. Ils doivent être loués pendant au moins dix ans sans possibilité d’être cédés. Quand un particulier investit en Pinel, il participe donc à la construction de logements intermédiaires qui conservent ce statut tant que l’investisseur bénéficie des réductions d’impôts générées par le Pinel (jusqu’à 12 ans). Voilà pourquoi les réflexions sur un après-Pinel sont étroitement associées à un développement du logement intermédiaire…

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Avantages fiscaux

Le logement intermédiaire bénéficie aujourd’hui d’avantages fiscaux avec une TVA réduite à 10% et une exonération de taxe foncière pendant 20 ans. Comme pour le Pinel, son loyer inférieur au marché réduit le risque de vacance locative. La plupart des logements intermédiaires construits ces dernières années proviennent de CDC Habitat et IN’LI, deux structures proches du giron public. Pour faire revenir dans le résidentiel les institutionnels (le résidentiel ne représenterait que 1% de leurs actifs contre 85% en obligations et actions) afin de pallier un arrêt du Pinel et maintenir un stock suffisant de logements à loyers plafonnés, il faudrait donc de quoi les attirer et les rassurer.

A l’heure où la baisse des permis de construire freine la construction, les auteurs du rapport soulignent que la levée des réticences des communes à délivrer des permis apparaît comme la première priorité. Ils proposent ensuite la substitution de l’exonération de taxe foncière par un crédit d’impôt et suggèrent de mettre fin au critère consistant à imposer au moins 25% de logements sociaux au sein des programmes de logement intermédiaire pour bénéficier du taux réduit de TVA fixé à 10%. Imposer des logements sociaux limite en effet fortement la rentabilité de tels programmes mixtes.

Que resterait-il aux particuliers ?

Et les investisseurs particuliers dans tout ça ? La mission confiée à l’IGF et au CGEDD estime que le développement de nouveaux fonds dédiés au logement intermédiaire en construction neuve (ou en rénovation de l’ancien), sous la forme d’organismes de placement collectif en immobilier (OPCI), pourrait permettre de continuer à diriger l’épargne des ménages vers le logement intermédiaire. Il s’agirait donc de créer des fonds mais sans avantage fiscal supplémentaire autre que ceux dont bénéficient déjà les institutionnels dans le cadre du logement intermédiaire. Son rendement locatif est estimé entre 2% et 3% et sa relative liquidité, avec possibilité de revente des parts alignée au maximum sur celle de la détention du bien, soit 10 ans, est estimée « suffisante pour attirer les investisseurs privés dans le contexte de taux actuel. »

Effet de levier de l’emprunt

Pourtant, acheter un logement locatif qu’on peut récupérer à la fin de la période d’engagement de location et investir dans un fonds est difficilement comparable. Le succès du Pinel repose indéniablement sur l’attachement des Français à la pierre. Le rapport reconnaît d’ailleurs que ce fonds de logements intermédiaires présente une limite majeure dans le sens où il constituerait une importante évolution culturelle du comportement de l’épargnant investissant dans l’immobilier. « Avec le Pinel, si l’épargnant recherchait avant tout le bénéfice fiscal, il était in fine propriétaire de son logement », reconnaissent les auteurs. Autre différence de taille : pour un particulier, l’investissement immobilier est le seul qui permette de faire jouer l’effet de levier de l’emprunt, particulièrement efficace avec des taux au plancher et bien sûr pertinent pour se constituer progressivement un patrimoine en prévision de la retraite. Impossible donc de recourir à un prêt immobilier classique pour investir dans un OPCI.

L'épargne au service du logement

Enfin, ce rapport n’aborde pas directement la problématique des petits promoteurs immobiliers dont certains dépendent beaucoup des ventes en Pinel. Il faut rappeler au passage que le Pinel garde aujourd’hui un rôle prépondérant dans la construction neuve avec environ un projet VEFA sur deux. Alors ne vaudrait-il pas mieux garder un dispositif fiscal comparable au Pinel tout en développant le logement intermédiaire grâce à l’investissement des institutionnels qui, rappelons-le, font fructifier une bonne partie de l’épargne financière des Français ?

a savoir

Le gouvernement envisage actuellement une poursuite du dispositif d’investissement locatif Pinel avec des paramètres inchangés en 2022. La ministre en charge du logement, Emmanuelle Wargon, propose ensuite de diminuer le taux de réduction d’impôt à partir de 2023, sauf pour les logements situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ou qui satisfont des normes environnementales exemplaires. Pour les logements neufs achetés en 2023, la réduction d’impôt pourrait ainsi diminuer à 10,5% pour un engagement de location de 6 ans contre 12% actuellement et à 15% pour un engagement de location de 9 ans (18% actuellement). Sur 12 ans, on passerait de 21% à seulement 17,5%.

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