Pierre & Vacances traîné en justice par quelque 900 propriétaires privés de loyers

Pierre & Vacances traîné en justice par quelque 900 propriétaires privés de loyers
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Près de 900 particuliers attaquent en justice le leader de la résidence de tourisme, pour récupérer les mois de loyers conservés par Pierre & Vacances. Une bataille judiciaire s’engage sur fond de crise économique.

Pierre & Vacances traîné en justice par quelque 900 propriétaires privés de loyers
Crédit photo © Pierre et Vacances Center Parcs

Entre 3.000 et 5.000€ par personne, c’est ce que doit le groupe Pierre & vacances à 740 propriétaires de cottages Center Parcs, selon une assignation portée jeudi 4 février devant le tribunal judiciaire de Paris. Plombé par la crise et la fermeture de ses résidences de tourisme pendant les confinements, le groupe a unilatéralement suspendu le versement des loyers, informe l’assignation. Réunis en association, les propriétaires, de simples particuliers qui ont voulu réaliser un investissement locatif, ont fini par saisir la justice.

Fermés à cause du Covid

« Nous avons essayé pendant plusieurs mois de régler l’affaire à l’amiable, mais cela n’a abouti à rien de vraiment concret ni d’acceptable », regrette Patrick Tabet, l’avocat qui représente ce collectif de plaignants, propriétaires de cottages au sein de quatre Center Parcs (les domaines des Bois Francs, du Bois aux Daims, des Hauts de Bruyère et des Trois Forêts). Lors du premier confinement, le groupe ne leur a plus reversé leur part de loyers. « Certains en ont perçus tout ou partie durant l’été, mais beaucoup d’autres n’ont rien eu », déplore Patrick Tabet. La situation ne s’est pas améliorée ensuite, car depuis novembre tous les Centers Parcs de France ont fermé leurs portes, les piscines et autres parcs aquatiques étant considérés comme des foyers propagateurs du Covid-19.

La fronde s’organise

Au total, cela représente plus de deux millions d’euros non reversés par Pierre & Vacances, vendeur et gérant de ces résidences, pour ces 740 bailleurs. Mais ils sont loin d’être un cas isolé. Patrick Tabet s’apprête à déposer une autre assignation, pour 150 personnes cette fois, concernant Village nature, la résidence premium de Marne-la-Vallée (Seine-et-Marne) lancée en grandes pompes en 2017.

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D’autres se fédèrent et mandatent également des avocats, tel Charles-Henri et l’une de ses copropriétaires, Isabelle, propriétaires d’appartements dans une résidence des Arcs 1800, qui n’ont pas touché quatre mois de loyers en 2020, soit 2.800€ environ chacun. « Dès le mois d’avril, nous avons reçu une lettre nous informant que nous ne toucherions pas les loyers correspondant à la période allant du 16 mars [début du premier confinement] à la mi-mai, raconte Isabelle. Or, la station, et donc la résidence, est toujours fermée dès le 15 avril jusqu’à l’été ! Puis, nous avons eu une autre lettre pour nous prévenir qu’ils allaient nous amputer de nos loyers de mi-octobre à mi-décembre pour cause de fermeture gouvernementale alors que, de toute façon, c’est toujours à cette période-là qu’ils effectuent des travaux dans la résidence et que celle-ci est fermée ! ». Pour elle, la Covid a donc bon dos.

Des loyers censés être garantis

Parmi ces propriétaires lésés, « beaucoup ont des crédits et ne perçoivent plus ou peu de revenus », plaide Patrick Tabet. Or, ces loyers sont censés être garantis en cas de carence locative… « C’est en tout cas l’argument de vente utilisé pour inciter à l’achat en résidences services », reproche l’avocat parisien. « Dans notre contrat, il est en effet stipulé noir sur blanc que le loyer est garanti quelle que soit la cause du problème ! », s’insurge Isabelle.

Dans la réalité pourtant, tous les contrats (signés entre l’investisseur particulier et l’exploitant de la résidence) ne comportent pas de clauses garantissant ces loyers, entraînant donc une inégalité juridique entre les propriétaires.

De piètres taux d’occupation

Pierre & Vacances, de son côté, argue notamment que « les biens étaient indisponibles pour cause de force majeure ». Les deux confinements ont en effet contraint tout le secteur du tourisme à se mettre en pause. De plus, certains hôteliers et exploitants ont décidé volontairement de ne pas rouvrir en fin d’année. Economiquement, ce n’était selon eux pas valable. A la montagne, seule « une petite moitié des résidences services ont rouvert pour la saison d’hiver après l’annonce de la fermeture des remontées mécaniques », précise Pascale Jallet, secrétaire générale du Syndicat national des résidences de tourisme (SNRT).

« Pour la période de Noël et Nouvel an, nous n’avons pu rouvrir que 9 résidences sur 70, avec un taux d’occupation moyen de seulement 20%..., révèle Pierre & Vacances à Investir. [Depuis] samedi 13 février, 46 d’entre elles [peuvent] de nouveau accueillir des vacanciers, mais nous estimons qu’elles ne seront occupées qu’à hauteur de 30% ». Rien qu’en 2020, le manque à gagner pour le groupe s’élève à 350 millions d’euros, dont 240 millions de Prêt garanti par l’Etat (PGE) qu’il faudra rembourser… Dans la tourmente, Pierre & Vacances espère obtenir de l’Etat, avec l’appui du SNRT et d’autres exploitants, « une indemnisation à hauteur de 70% des charges fixes », nous a confié le groupe.

Il a également demandé la semaine dernière au tribunal de Commerce de Paris l’ouverture d’une procédure de conciliation amiable pour « engager des échanges et trouver des solutions avec certains de nos partenaires financiers ». Les petits créanciers particuliers, eux, n’en font partie !

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