La nouvelle baisse des taux d’usure pose problème à certains emprunteurs

La nouvelle baisse des taux d’usure pose problème à certains emprunteurs

Les taux d’intérêt très bas n’ont pas que des vertus pour les emprunteurs immobiliers puisqu’en tirant les taux d’usure à la baisse, certains candidats à l’accession parfaitement solvables peuvent se retrouver exclus du crédit…

La nouvelle baisse des taux d’usure pose problème à certains emprunteurs
Crédit photo © iStock

Révisés chaque trimestre, les taux d’usure publiés par la banque de France ont de nouveau reculé début janvier pour se situer à 2,79% (2,82% auparavant) pour les prêts immobiliers à taux fixe d'une durée inférieure à 10 ans, à 2,83% (2,85% auparavant) pour les prêts d'une durée comprise entre 10 ans et moins de 20 ans, à 3,01% (3,08% auparavant) pour les prêts de 20 ans et plus et à 3,24% (3,25% auparavant) pour les prêts relais.

Formule de calcul

Le taux d’usure est calculé en ajoutant un tiers au taux effectif moyen pratiqué sur la période (le trimestre précédent). Ce taux d’usure correspond au taux annuel effectif global (TAEG) maximal au-dessus duquel il est interdit d’accorder un prêt immobilier. Sont donc inclus dans ce taux maximum : le taux nominal du crédit, le taux de l’assurance du crédit, les frais liés à la garantie, les honoraires et éventuels frais de dossier.

Les taux d’intérêt très bas n’ont donc pas que des vertus pour les emprunteurs immobiliers puisqu’en tirant les taux d’usure à la baisse, certains candidats à l’accession parfaitement solvables peuvent se retrouver exclus du crédit à cause d’un taux d’usure dont la formule de calcul n’est plus adaptée aux taux actuels.

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Effet pervers

Un effet pervers en quelque sorte puisque le taux d’usure a, au contraire, été créé pour protéger les emprunteurs contre les abus et les taux trop élevés. Or, depuis quelques années, ce taux d’usure ne cesse de diminuer et exclut certaines catégories d’emprunteurs, notamment les plus faibles revenus (ne bénéficiant pas des taux nominaux les plus bas), les personnes à risques (santé ou profession) et également les seniors.

« Le taux de l’usure des prêts immobiliers sur des durées de 20 ans et plus a encore baissé de 0,07% ce trimestre, après une baisse de 0,11% au trimestre précédent… Au total, il a baissé de 0,35% depuis janvier 2018, alors même que les taux nominaux moyens sur 20 ans n’ont baissé que de 0,15%, soit presque de moitié moins ! Dès que les taux remonteront de façon plus marquée, ce sera en premier lieu sur les durées longues, avec un vrai risque d’effet ciseau et d’exclusion du crédit pour certains emprunteurs », explique le courtier Vousfinancer.

Cas réels

Meilleurtaux déplorait déjà en octobre dernier plusieurs exemples récents de financements refusés par les banques parce que le TAEG a dépassé le taux d’usure, en particulier des personnes à risque comme des seniors avec un taux d’assurance élevé. Des dossiers qui étaient souvent finançables un an auparavant.

C’était le cas pour ce couple de 60 ans contractant un prêt achat revente de 1.240.000 € au taux nominal de 1,85% sur 25 ans mais avec un TAEG de 3,12% avec l’assurance groupe, le mari ayant eu une surprime sur l’assurance en raison de problèmes cardiaques. Ce TAEG était donc supérieur au taux d’usure de 3,08%, même après un geste de la banque qui avait réduit de 0,2% le taux nominal accordé.

Autre cas : un couple (Monsieur est pompier professionnel et madame gérante salariée d’un salon de coiffure) empruntant 445.000 euros sur 20 ans à 1,20%. Malgré un excellent profil financier et un bel apport, aucune banque traditionnelle n’a pu se positionner du fait du dépassement du taux d’usure lié aux primes d’assurances élevées (métier à risque de Monsieur). D’après Meilleurtaux, il aurait fallu 0,8% de taux nominal sur 20 ans pour compenser le coût de l’assurance…

Une formule à revoir

Dans le cas différent d’un regroupement de crédits (immobilier et consommation), les frais engendrés par le rachat d’un crédit hypothécaire peuvent là aussi faire dépasser le taux d’usure alors que le dossier est au départ parfaitement finançable et générateur d’économies. Autant d’exemples qui montrent qu’il faudrait revoir cette formule de calcul du taux d’usure ou neutraliser certains postes du TAEG comme l’assurance ou les frais de dossier. Ces solutions passent en tout cas par une évolution du texte de loi.

Cercle vicieux

« Nous sommes actuellement dans un cercle vicieux : comme le taux d’usure est très bas, certains dossiers d’emprunteurs ne passent plus, donc le taux qu’ils auraient dû obtenir n’est pas pris en compte dans le calcul du taux d’usure qui se base seulement sur les dossiers acceptés, les meilleurs, qui obtiennent les taux les plus bas ! Donc le taux d’usure n’augmente pas… C’est pourquoi il met plus de temps à remonter que les barèmes affichés par les banques, qui, bien conscientes du problème doivent elles aussi limiter la hausse des taux, avec un impact sur la rentabilité des prêts qu’elles accordent », analyse d’ailleurs Jérôme Robin, directeur général de Vousfinancer.

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