Tribune de Valérie Batigne, dirigeante-fondatrice de Sapiendo Retraite.
Dans le contexte d’un probable recul de l’âge légal de départ à la retraite, le rachat de trimestres, s’il vous en manque peu pour obtenir le taux plein, risque de s’avérer inutile. Explications.
Tous les régimes de retraite de base fonctionnent sur le même principe : pour obtenir une retraite à taux plein, donc sans minoration, vous devez non seulement avoir l’âge légal qui vous autorise à partir à la retraite, mais aussi réunir un certain nombre de trimestres.
Celui-ci varie selon votre âge. Il est de 168 pour les générations 1961 à 1963, 169 pour celles de 1964 à 1966 et un trimestre de plus toutes les trois générations jusqu’à atteindre 172 à partir de la génération née en 1973.
Si vos projections vous prédisent un nombre de trimestres insuffisant pour prétendre au taux plein lorsque vous atteindrez l’âge légal, le rachat de trimestres est peut-être une solution éviter ou réduire la décote. Il est autorisé, dans la limite de 12 trimestres, pour racheter vos années d’études supérieures ou pour compléter les années où vous avez validé moins de 4 trimestres. Vous pouvez également racheter des périodes d’activité salariée hors de France. Cependant, lorsque le rachat est possible, il n’est pas forcément opportun.
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Le rachat de trimestres ne permet pas de partir avant l’âge légal
Actuellement, l’âge légal pour prendre sa retraite est fixé à 62 ans. Vous ne pouvez pas partir avant, sauf dans des situations exceptionnelles : carrière longue, handicap, invalidité… L’une des mesures phares de la réforme des retraites, souhaitée par le président de la République et en phase de négociations avec les partenaires sociaux, consiste à reculer l’âge légal de la retraite progressivement de 4 mois tous les ans à partir de l’été 2023 pour parvenir à 64 ans en 2028, voire 65 ans en 2031. Ainsi, la génération 1962 devrait attendre 2025, soit 63 ans, pour pouvoir partir, au lieu de 62 ans actuellement.
Si vous avez racheté des trimestres en vue d’atteindre le nombre requis pour le taux plein, soit 168 en 2024, date à laquelle vous pensiez pouvoir partir, ces trimestres ne vous autoriseront pas pour autant à prendre votre retraite en 2024, à 62 ans. Vous devrez attendre de quelques mois à un an de plus selon votre mois de naissance pour vous arrêter.
Le rachat de trimestres n’est pas toujours intéressant
Acheter des trimestres à l’aube d’une réforme risque d’être contreproductif. Démonstration : né en mai 1962, il vous faut 168 trimestres pour avoir le taux plein dès l’âge légal de départ, le 1er juin 2024. Or, d’après vos calculs, vous n’en aurez que 166. Vous en rachetez deux.
Entretemps, la loi vous oblige à travailler plus longtemps : vous devez attendre le 1er janvier 2025 pour pouvoir partir. A cette date, vous aurez travaillé sept mois de plus, qui vous auront permis d’obtenir les 2 trimestres qu’il vous manquait. Les deux trimestres rachetés ne vous auront été d’aucune utilité.
En revanche, s’il vous manque de nombreux trimestres pour atteindre le taux plein, en racheter quelques-uns peut s’avérer gagnant. Surtout si vous êtes fortement imposé : le rachat de trimestre coûte cher, mais il est déductible de vos revenus imposables, ce qui vous offre une économie d’impôt.
Un bilan s’impose pour vérifier la pertinence du rachat
Plus vous avancez en âge, plus le rachat de trimestres coûte cher. Toutefois, il n’est pas judicieux d’acheter trop tôt. J’attire votre attention sur la législation qui risque d’évoluer d’ici à votre retraite ; mieux vaut attendre d’approcher de l’âge de la retraite. Vous y verrez plus clair sur votre carrière et sur le nombre de trimestres qu’il vous manque pour obtenir le taux plein.
Par ailleurs, avant de vous lancer, un bilan retraite par un cabinet spécialisé s’impose. Il calculera le coût du rachat, variable selon l’option choisie parmi deux formules possibles, en intégrant la déduction fiscale à laquelle vous avez droit et vous indiquera combien d’années de retraite seront nécessaires pour amortir votre investissement. En toute logique, plus longue est cette durée, moins l’opération sera conseillée.