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Assurance vie : soigner sa clause bénéficiaire pour éviter les mauvaises surprises

Assurance vie : soigner sa clause bénéficiaire pour éviter les mauvaises surprises

Que faut-il inscrire, ou non, dans une clause bénéficiaire ? L'accord du bénéficiaire est-il nécessaire ? Peut-on la modifier ? Quels sont les risques si sa rédaction est défaillante ? Le point sur cette modalité essentielle de l'assurance-vie.

Assurance vie : soigner sa clause bénéficiaire pour éviter les mauvaises surprises
Crédit photo © iStock

Incontournable dans les contrats d'assurance vie, la clause bénéficiaire permet au souscripteur de déterminer la personne qui recevra les capitaux-décès issus du contrat, que ce soit sous forme de capital ou sous forme de rente. Cette clause particulière est utilisée en pratique pour déterminer les modalités de versement des sommes aux bénéficiaires du contrat.

La clause bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie est-elle obligatoire ?

Elle n'est pas obligatoire, mais elle reste d'une importance cruciale. En son absence, ou si son libellé est mal rédigé, les capitaux vont retomber dans l'actif successoral de l'assuré.

Conséquence : ces capitaux ne relèveront pas du régime fiscal de l'assurance vie, mais de celui du droit des successions. Lequel sera dans beaucoup de cas de figures bien moins favorable au bénéficiaire, en particulier s'il s'agit d'un concubin, d'un parent "éloigné" aux yeux du fisc ou sans lien de parenté avec l'assuré.

Les limites de la clause-type

Dans la pratique, les assureurs rédigent le plus souvent une clause standardisée du type : « Mon conjoint, à défaut mes enfants, nés ou à naître, vivants ou représentés, par parts égales ; à défaut mes héritiers, par parts égales ».

Le conjoint y est désigné comme bénéficiaire de premier rang, les enfants en second et les héritiers en troisième. Le terme "à défaut" permet de passer au rang suivant en cas de décès ou renonciation de la personne désignée au rang précédent. Il met ainsi en place un ordre de priorité, précise Marion Capele, directrice adjointe du pôle solutions patrimoniales de Natixis Wealth Management.

L’assuré aura toutefois intérêt à personnaliser cette clause, bien sûr s’il souhaite désigner d’autres personnes, mais aussi parce que l’application de la clause-type au dénouement du contrat peut réserver quelques surprises. Sachez en effet que la désignation des bénéficiaires s’applique juridiquement au moment du dénouement du contrat.

Exemple pour la qualité de "conjoint" : si le souscripteur a par exemple divorcé et s’est remarié après la rédaction de la clause, c’est le nouveau conjoint qui deviendra automatiquement bénéficiaire du contrat d’assurance vie. « On notera également que la mention "conjoint" n’inclut pas le partenaire pacsé, bien que certaines décisions de justice aient dans le passé assimilé ces deux notions », prévient Marion Capele.

Autre cas de figure : la notion « enfants nés ou à naître, vivants ou représentés » signifie que si l’un des enfants devait décéder avant le dénouement du contrat, sa part reviendrait à ses propres enfants et non à ses frères et sœurs.

Sécuriser la désignation des bénéficiaires

La personnalisation de la clause permettra ainsi de mieux sécuriser la désignation des bénéficiaires en les identifiant précisément. Le mieux étant de prévoir une clause qui s'adapte aux éventuelles évolutions de votre situation : un divorce, un remariage, etc. en étant par exemple rédigée de la sorte : « Mon conjoint non divorcé, non séparé de corps, non engagé dans une procédure de divorce ou de séparation de corps ».

Vous pourrez en toute liberté définir le rang de vos bénéficiaires ainsi qu’en déterminer la répartition du capital, les modalités de leur versement, voire leur utilisation. Vous pouvez aussi prévoir des bénéficiaires de second rang en cas de décès du bénéficiaire de premier rang.

Clause démembrée

Le souscripteur est libre de définir la répartition des bénéficiaires. Ainsi, il peut décider de donner 20% à un bénéficiaire et 80% à un autre bénéficiaire, ou encore la nue-propriété à un bénéficiaire et l'usufruit à un autre, ce que l'on nomme une "clause démembrée".

Il peut aussi laisser aux bénéficiaires différents choix lors du dénouement du contrat, ce que l'on nomme une "clause à options".

Soigner la clause à options

Il sera ainsi souvent laissé au conjoint - en tant que bénéficiaire de premier rang - de choisir en temps voulu la répartition des actifs entre lui-même et ses enfants.

Les compagnies d'assurance ont longtemps été réticentes à accepter ce type de solutions, souligne Marion Capele. En effet, elles analysaient l'exercice de la faculté d'option par le bénéficiaire de premier rang comme une donation indirecte au profit des bénéficiaires de second rang, impliquant l'exigibilité des droits.

Mais une réponse ministérielle de 2016, concluant à l'absence de donation indirecte taxable dans cette situation, a écarté cette interprétation, précise la spécialiste. Toutefois, certaines compagnies continuent de ne pas souhaiter la retenir.

Attention, la clause devra faire apparaître précisément les quotes-parts envisageables, au choix du bénéficiaire, exprimées en pourcentage, ainsi que le délai octroyé pour exercer son droit d'option. Le solde des capitaux sera versé aux rangs subséquents, conseille-t-elle.

L'utilité du notaire

La clause bénéficiaire peut être directement mentionnée dans la proposition d'assurance (cas le plus fréquent), ou dans un document annexé au contrat (feuille libre). Elle peut aussi être réalisée auprès d’un notaire. En cas de contrats multiples, cela facilite la gestion de la clause bénéficiaire, qui est centralisée à un seul endroit.

En complément, l'assuré bénéficie d'un gage de sécurité supplémentaire afin de rédiger sa clause de manière optimale. A noter que la clause peut être déposée chez le notaire sans être rédigée par testament.

L'acceptation du bénéficiaire

Avant la loi du 17 décembre 2007, le souscripteur n'avait pas à donner son accord pour l'acceptation du bénéficiaire relative à sa désignation dans le contrat. Depuis cette date, elle doit être validée par lui. Il s'agit d'un acte en principe irrévocable, sauf exceptions comme par exemple la révocation pour ingratitude.

Ainsi, dès lors qu'il existe un bénéficiaire acceptant, la clause bénéficiaire ne peut plus être modifiée sans l'accord du bénéficiaire acceptant. De même, le souscripteur ne peut plus réaliser d'arbitrage, d'avance ou nantir le contrat sans l'accord des bénéficiaires acceptants.

Si le bénéficiaire n'a pas accepté sa désignation, en revanche, le souscripteur peut modifier la clause bénéficiaire à tout moment. Il doit informer l’assureur de sa décision par l'envoi d’une simple lettre.

Lorsque l'assureur reçoit la lettre, il établit un avenant qui modifie la clause bénéficiaire du contrat initial.

Cas d'invalidité de la clause bénéficiaire

Il convient de veiller à certains points pour que la clause soit considérée comme valable. En premier lieu, le souscripteur doit être en pleine capacité au moment de la définition de la clause bénéficiaire.

La Cour de cassation a ainsi jugé récemment, que le respect des dispositions relatives à la régularité des actes accomplis par une personne placée sous le régime de curatelle « ne fait pas obstacle à l’action en nullité pour insanité d’esprit ». En somme, la présence du curateur, condition nécessaire à la régularité d’un avenant au contrat d’assurance-vie, n’est pas à elle seule suffisante pour que l'acte ne soit annulé.

Dans une décision d'il y a quelques mois, la Haute Juridiction a par ailleurs rappelé qu'un héritier pouvait contester la validité du changement de bénéficiaire après le décès du souscripteur si les circonstances extérieures de ce changement de désignation ne permettaient pas d'assurer que la volonté du souscripteur avait été exprimée d'une manière certaine et non équivoque.

Par ailleurs, les primes ne doivent pas être considérées comme manifestement exagérées, auquel cas, les héritiers peuvent demander la réintégration du contrat dans l'actif successoral. Ce point est sensible en cas de volonté de l'assuré de déshériter ses héritiers naturels au profit d'un bénéficiaire particulier.

Si en pratique, la notion de primes manifestement exagérées est discutée par les juges, quoi qu'il en soit, il convient de préserver la réserve héréditaire pour éviter d'être attaqué sur ce point.

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