Réforme des retraites : après le vote du Sénat, le spectre du 49.3 plane (encore) à l’Assemblée nationale

Réforme des retraites : après le vote du Sénat, le spectre du 49.3 plane (encore) à l’Assemblée nationale
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Journée décisive pour le projet de réforme des retraites qui revient cet après-midi à l'Assemblée nationale. La tension politique est à son comble.

Réforme des retraites : après le vote du Sénat, le spectre du 49.3 plane (encore) à l’Assemblée nationale
Crédit photo © iStock

Sans grande surprise, la commission mixte paritaire (CMP) du Parlement a adopté hier le projet de réforme des retraites du gouvernement, qui sera aujourd’hui présenté pour une seconde lecture au Parlement.

Après moins de deux heures de discussions, le Sénat vient d'adopter ce matin le texte de la CMP, une version de la réforme aménagée à la marge, conservant par exemple le CDI sénior sous une forme finalement expérimentale, et une modification du volet "carrières longues" pour le moins opaque, comme le décrypte Public Sénat : "Non, le compromis en CMP ne permet pas de limiter la durée de cotisations à 43 ans pour tous".

C'est désormais à l’Assemblée nationale de prendre la relève, où les discussions doivent débuter à 15h dans une ambiance pour le moins électrique. Alors que les mouvements de grève se poursuivent en France, les débats dans l’Hémicycle promettent un nouvel examen sous haute tension.

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Grande inconnue de la session de ce jeudi après-midi : l’utilisation de l’article 49.3 par le gouvernement, qui imposerait l'adoption sans vote du texte.

Si l’exécutif assure que l’emploi du 49.3 n’a pas été évoqué en conseil des ministres mercredi, les dissensions sur le texte au sein des députés de la droite – dont le soutien, on le rappellera, est essentiel au vote simple du texte – font planer le spectre d’une nouvelle utilisation de cet article, déjà très usité depuis la nouvelle composition éclatée du Palais Bourbon.

Cependant, après des semaines de discussions et de bras de fer social sur ce projet cher à Emmanuel Macron, il y a peu de chances que le gouvernement se risque à un vote simple s’il n’a pas la garantie de le remporter.

Pour parvenir à passer le texte sans le 49.3, la majorité doit donc être assurée du soutien des Républicains. Le gouvernement affiche sa confiance quant à l’existence d’une « majorité dans cette Assemblée », comme l’a assuré cette semaine la Première ministre, mais en coulisses, les tractations se poursuivent.

Car le recours au 49.3, perçu par l’opinion comme un nouveau passage en force, promet de fracturer davantage les équilibres politiques et radicaliser le jeu des oppositions.

Histoire de laisser le gouvernement face à ses propres responsabilités, le Chef de l’Etat lui-même a fait savoir hier soir qu’il souhaitait passer par un vote simple plutôt que d’utiliser cette procédure, rapporte franceinfo.

Motion de censure

Un autre obstacle se dessine par ailleurs avec le scénario du 49.3 : celui d’un vote d’une motion de censure transpartisane, déposée par le groupe LIOT (Liberté, Indépendants, Outre-mer et Territoires), qui séduit des deux côtés des bancs de l'Assemblée.

L'éventualité du vote de cette motion est jugée peu probable par le politologue Franck Morel, qui a déclaré à La Dépêche que « tous les parlementaires hostiles à la réforme n'ont pas intérêt à voter une motion de censure ».

« Si demain de nouvelles élections législatives s'organisaient, le Rassemblement national en serait le principal bénéficiaire, la majorité s'en trouverait impactée et les chiffres de la Nupes seraient assez difficiles à déterminer », estime-t-il.

En attendant, la carotte d’une dissolution semble relativement tentante pour un certain nombre de députés Les Républicains, dont la position politique, avec ce texte, relève de l’injonction paradoxale : soutenir une réforme qu'ils ont toujours souhaitée, mais fondre ainsi un peu plus le parti dans l’ombre de Renaissance.

L'idée, même très risquée, de rebattre les cartes de l’Assemblée nationale, semble séduire à tel point que le chef de file des députés Les Républicains, Olivier Marleix, a dû élever la voix mardi en déclarant que tout élu de son groupe qui cosignerait la motion de censure LIOT serait exclu du parti.

Le vote de ce jeudi sur l’une des réformes les plus impactantes de ces dernières années sur le quotidien des Français et l'économie du pays - relèvera principalement d’une partie de poker politique.

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