La France classée 21e au palmarès mondial CFA/Mercer des systèmes de retraite

La France classée 21e au palmarès mondial CFA/Mercer des systèmes de retraite

Cette année, notre système de retraite perd une place au classement du Mercer CFA Institut Global Pension Index qui compare 43 modèles dans le monde. Son équilibre financier de long terme est jugé "extrêmement fragile".

La France classée 21e au palmarès mondial CFA/Mercer des systèmes de retraite
Crédit photo © Reuters

Voici un rapport qui devrait continuer de nourrir les débats sur la réforme des retraites. La dernière enquête des systèmes de retraite dans le monde réalisée par le CFA Institute, en collaboration avec Mercer et le Monash Center for Financial Studies place cette année la France dans le milieu de tableau de son classement international.

En 21e position sur 43 pays analysés, la France obtient une valeur de 60,5 au Mercer CFA Institute Global Pension Index (MCGPI) : ce score est en amélioration de 0,5 point par rapport à 2020, mais l’Hexagone perd une place au classement général cette année.

Le MCGPI est réalisé tous les ans sur la base d’une cinquantaine de critères pondérés relatif à la performance (mesurant le niveau de vie des retraités), à la viabilité (l’équilibre financier à long terme) et à l’intégrité (la lisibilité de son fonctionnement pour les citoyens) des systèmes de retraites.

L’Islande, meilleur système de retraite du monde

Selon cette étude, les modèles de retraite les plus exemplaires dans le monde en 2021 – ceux ayant obtenu la note A (avec un indice supérieur à 80) - sont ceux de l’Islande (84,2), des Pays-Bas (83,5) et du Danemark (82). Des pays dont les systèmes de retraite sont considérés comme financièrement solides et bien gérés, tout en versant un revenu suffisant aux retraités.

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Ce top 3 est suivi de près par Israël (77,1), la Norvège (75,2), l’Australie (75) et la Finlande (73,3). Le Royaume-Uni se place dans le top 10 avec un indice à 71,6, l’Allemagne est à la 15e place (67,9), les Etats-Unis à la 19e, et la Chine à la 28e, ces deux derniers pays enregistrant les deux remontées les plus importantes par rapport à 2020, portés par « les effets de leur précédente réforme, qui commencent à s’observer en 2021 : amélioration des pensions pour les individus, et de la réglementation des retraites », analyse le CFA Institute.

La Thaïlande et l’Argentine en bas de tableau

Les nations les plus faiblement notées sont la Thaïlande (40,6), l’Argentine (42), les Philippines (41) ou encore l’Inde (40), des économies en développement particulièrement touchées par la crise sanitaire, et faisant face à des défis démographiques importants. Mais on retrouve aussi dans ce bas de tableau des pays beaucoup plus "prospères" : le Japon (49,8), ainsi que la Corée du Sud (48,3), dont les systèmes sont notamment mis à mal par leur complexité et une forte dette publique.

La France et les Etats-Unis notés C+

Pour sa part, la France se place donc dans un groupe de cinq pays notés "C+", aux côtés de la Belgique, des Etats-Unis, de Hong-Kong et de l’Uruguay, dont les systèmes sont jugés « disposer de solides bases, mais comprenant également des risques majeurs et/ou des lacunes […] qui pèseront sur leur efficacité ou leur stabilité à long terme s’ils ne sont pas corrigés ».

C’est sur le volet de la "performance" que le système français des retraites obtient la meilleure note (79,1), son intégrité (56,8, à la 38e place) et sa viabilité (41,8, à la 33e place) étant considérées en revanche comme beaucoup plus critiques, avec des indices inférieurs à la moyenne des pays du panel : « La force de son système […] obligatoire est de permettre aux retraités de recevoir un revenu décent une fois à la retraite, alors que l’équilibre financier long-terme reste extrêmement fragile (fonction de l’équilibre démographique et de la croissance économique), et que ce système est difficilement compréhensible aux yeux des Français », considèrent les auteurs de l’enquête.

Augmenter les cotisations et l’âge de départ en retraite

Selon eux, le système français pourrait être amélioré via un ensemble de mesures, qui s’accordent avec ce que défendent peu ou prou l’exécutif et la droite sur le chantier de la réforme en suspens : l’augmentation des cotisations de la part des actifs, le relèvement de l’âge de départ en retraite – deux propositions qui enflamment le débat public – une hausse du taux d’activité des seniors « à mesure que l’espérance de vie augmente » (ce qui a priori semble rejoindre la question du relèvement de l’âge de départ), et, enfin, une « amélioration des exigences réglementaires pour le système de retraite privé ».

Le rapport considérant qu’avec une dette alourdie par les mesures de relance liées à la crise sanitaire, les régimes de retraite des gouvernements doivent continuer d’encourager le relai du financement privé des pensions via des plans d’épargne retraite. « Les individus doivent assumer de plus en plus la responsabilité de leur propre revenu de retraite, mais ils ont besoin pour cela d’une réglementation et d’une gouvernance solide pour être soutenus et protégés », considère David Knox, senior partner chez Mercer et auteur principal du rapport.

Il recommande également de « supprimer les conditions restrictives d'éligibilité pour les personnes qui souhaitent adhérer à des régimes de retraite liés à l'emploi », telles que le critère d'une ancienneté minimum de trois ans qui s'applique actuellement au régime de retraite français de prestation défini ("article 39"). « Chaque individu devrait avoir le droit de participer à un régime de retraite quel que soit son niveau de salaire, quel que soit son taux d’emploi ou son ancienneté, afin de lui permettre de se constituer une pension suffisante », souligne-t-il.

In fine, les experts prônent l'instauration de systèmes de retraite mixtes, combinant à la fois un modèle par répartition et par capitalisation : « Les pays ayant adopté ces modèles mixtes sont d'ailleurs les mieux notés de notre panel », souligne Christel Bonnet, directrice conseil Transition Emploi Retraite chez Mercer France et porte-parole de l'enquête.

Les inégalités femmes-hommes présentes dans tous les systèmes de retraite

Enfin, une part importante de l’étude est consacrée aux inégalités femmes-hommes face à la retraite. Sans surprise, ces dernières restent criantes au sein du système français, et de la plupart des autres systèmes étrangers, rapporte le CFA Institute.

Alors qu’une récente enquête Odoxa pour Groupama avait estimé que les pensions des femmes sont environ inférieures de 40% à celles des hommes dans notre pays, le rapport du MCGPI note pour sa part un écart moins important, mais qui reste très significatif, et supérieur à la moyenne observée dans l’OCDE : les femmes percevraient en France un revenu moyen de retraite 28% plus faible que celui des hommes, à 1.399€ bruts mensuels contre 1.947€.

48% de différence au Japon

Au sein de l’OCDE, les différences de pensions les plus fortes entre les deux sexes sont relevées au Japon (48%), au Mexique (41%), en Autriche, au Royaume-Uni, au Luxembourg et aux Pays-Bas (40%). La France se place en 8e position de ce palmarès des mauvais élèves, juste derrière les Etats-Unis.

A contrario, l’Estonie (moins de 5%), le Danemark (8%), la Slovaquie (10%) et l’Islande (11%) sont les pays où les écarts enregistrés sont les plus faibles.

Un gender gap multifactoriel

En comparant les systèmes de retraite, les marqueurs socio-culturels et la structuration de l’emploi des nations les plus exemplaires et de celles les plus "discriminantes", les auteurs de l’étude constatent que le "gender gap" des pensions est multifactoriel, et que le poids de chacun de ces facteurs varie – sensiblement – d’un cas d’espèce à l’autre.

Illustration frappante avec l’Estonie, quasi-exemplaire sur ce point, où, pourtant, historiquement, l’écart des salaires entre hommes et femmes était très important (en 2000, il était de 25%), et où le taux de pauvreté des femmes reste aujourd’hui bien plus élevé que celui des hommes – deux facteurs a priori déterminants dans le creusement de l’écart des pensions entre les deux sexes ; or, ces points faibles semblent de facto contrebalancés par d’autres éléments, comme le fait que l’Estonie compte parmi les quelques pays de l’OCDE (avec la France) où les femmes sont plus nombreuses que les hommes à posséder un plan d’épargne personnel*…

Agir sur l’emploi et le taux de pauvreté

Le CFA Institute relève quand même deux problèmes majeurs auxquels les Etats doivent s’attaquer pour réduire ces différences de traitement : le taux de pauvreté chez les seniors – qui touche principalement les femmes et pourrait être réduit par l’instauration d’un niveau de pension de retraite minimum – ainsi que les inégalités femmes-hommes devant l’emploi.

Pour ce qui est du cas de la France, le rapport préconise une meilleure prise en charge des droits à la retraite des femmes pendant le temps où elles s’occupent d’enfants en bas âge, et de personnes âgées ou handicapées à titre d’"aidantes". Car si aujourd’hui, les femmes bénéficient de certaines compensation de leur période d’arrêt de travail (comme des trimestres de majoration pour les enfants), ces mesures ne protègent pas d’une diminution du montant de leurs pensions (suspension des points Agirc-Arrco).

*Towards Improved Retirement Savings Outcomes for Women, OCDE, mars 2021.

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