Fiscalité de l’assurance-vie : une usine à gaz en perspective

Fiscalité de l’assurance-vie : une usine à gaz en perspective
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En voulant modifier la taxation des contrats au-delà de 150.000 euros d’encours et uniquement pour les nouveaux versements, le gouvernement risque surtout de compliquer les choses

Fiscalité de l’assurance-vie : une usine à gaz en perspective
Crédit photo © Reuters

L’assurance-vie va elle aussi avoir sa réforme fiscale. Bruno Le Maire l’a confirmé hier à l’université d’été du Medef. Rien ne changera en dessous de 150.000 euros d’encours. Pas de changement non plus à prévoir pour les gains obtenus sur les versements effectués avant la réforme. En revanche, dans les autres cas, les rachats seront soumis à la flat tax de 30% prévue pour les revenus du patrimoine. D’après Bercy, cela concernera environ 3% des contrats.

Le gouvernement reste donc sur la ligne fixée par Emmanuel Macron avant son élection. Il n’empêche que les évolutions à venir soulèvent de nombreuses questions et font craindre la mise en place d’une véritable usine à gaz fiscale pour les contrats concernés.

Un seuil difficile à apprécier

A première vue, le gouvernement compte apprécier le seuil de 150.000 euros non pas par contrat mais par tête. Une évaluation par contrat risquerait en effet de provoquer des mouvements d’optimisation (ouverture de plusieurs contrats pour ne pas dépasser les 150.000 euros).

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Mais la solution envisagée ne règlera pas tous les problèmes. C’est en effet l’assureur qui est chargé de prélever la fiscalité sur un rachat (en cas de prélèvement forfaitaire). Or, comment l’assureur pourra-t-il connaître avec certitude les encours d’assurance-vie d’un client (et donc la fiscalité à retenir), si ce client détient des contrats dans d’autres établissements ?

Des calculs complexes

Une fois la question du seuil réglée, il faudra passer au prélèvement. Et là encore, l’affaire ne sera pas simple. Imaginons un client détenant 200.000 euros sur son contrat. En cas de rachat, deux fiscalités seront applicables : le cadre actuel pour les gains issus d’un encours limité à 150.000 euros et la flat tax au-delà.

Il faudra donc faire de lourds calculs pour reconstituer l’évolution du contrat et ventiler les encours selon la fiscalité applicable. Un tâche qui sera encore plus compliquée en cas de versements effectués avant et après la réforme. Quels seront les gains attribués aux versements anciens et aux versements nouveaux ? Les ordinateurs des assureurs risquent de chauffer.

Un changement de philosophie

La réforme va enfin modifier en profondeur la relation des épargnants avec l’assurance-vie. Aujourd’hui, la fiscalité sur les rachats est dégressive. Plus la détention est longue, plus le taux forfaitaire appliqué est intéressant. La fiscalité donne donc une prime aux détentions longues.

En instaurant une taxe unique à 30%, le gouvernement va remettre en cause ce principe. Pour les contrats concernés, la fiscalité sera la même que le rachat soit effectué au bout de 6 mois ou au bout de 8 ans. Par rapport à la situation actuelle, il va donc offrir une prime aux détentions courtes. Comme l’ont montré nos récents calculs, un rachat effectué avant 4 ans est actuellement taxé à 50,5% (au taux forfaitaire). Demain, la pression fiscale sera ramenée à 30%, favorisant très nettement les rachats anticipés.

L'exemple du capital transmis

Lors du décès d’un assuré, le capital octroyé au(x) bénéficiaire(s) subit une fiscalité qui dépend de plusieurs paramètres (date d’ouverture du contrat, date des versements, âge de l’assuré au moment des versements). Ainsi, le capital issu d’un même contrat peut être taxé selon deux régimes différents, par exemple si une partie des versements a eu lieu avant les 70 ans de l’assuré et une autre partie après.

En regard de ce casse-tête, la fiscalité actuelle des rachats a le mérite d’être (relativement) simple à appréhender. En voulant la modifier, le gouvernement risque avant tout de créer un dispositif illisible.

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