Cryptomonnaies : la crise est-elle derrière nous ?

Cryptomonnaies : la crise est-elle derrière nous ?

Après l'euphorie, puis la panique, le temps de la repentance est peut-être venu…

Cryptomonnaies : la crise est-elle derrière nous ?
Crédit photo © iStock

Les prophètes de l'apocalypse semblent avoir eu raison : la bulle a explosé et les cryptomonnaies ont traversé des épreuves inédites depuis la création de la première d'entre elles, le bitcoin, en 2009. Ce dernier accuse encore une perte de 60 % par rapport à son record de novembre 2021. Après l'euphorie, puis la panique avec la chute de FTX, en novembre 2022, le temps de la repentance est peut-être venu.

« C'est un secteur qui n'a jamais été très solide, et les derniers événements ont démontré sa fragilité intrinsèque, remarque Emmanuelle Assouan, directrice générale de la stabilité financière et des opérations à la Banque de France, à l’occasion d’une table ronde consacrée aux cryptomonnaies, organisée par Investir le 9 mai. Donc on a soit de la mauvaise gestion financière du risque, soit de la pure fraude. » Selon elle, la crise n'est « pas du tout finie ».

De nombreux acteurs et cryptomonnaies sont nés avec la promesse de l'émancipation d'une autorité de type banque centrale, mais ils se sont révélés vulnérables à quelques individus malintentionnés qui ont pris ainsi avec eux les investisseurs en otages.

« Il y a une forme de mythe des origines sur le caractère totalement distribué, la non-concentration, la décentralisation, continue Emmanuelle Assouan. Au contraire, ce que l'on voit se construire, ce sont des empires de l'ordre du conglomérat. FTX, c'était un peu cela. Binance est un autre bel exemple. »

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Du "grand nettoyage" à la maturité ?

Ambre Soubiran, PDG du cabinet d'analystes Kaiko, observe aussi qu'il y a « une mauvaise appréhension du risque » dans l'univers des cryptomonnaies, notamment un manque de contrôle de la profondeur de marché de ces actifs (s'il y a bien des ordres d'achat et de vente à un prix assez proche et dans des volumes similaires).

Cependant, elle ne porte pas le même diagnostic : « Le système est fragile et assez immature encore, mais je pense qu'on est plus forts aujourd'hui qu'on ne l'était il y a un an. Nous avons assisté à une sorte de grand nettoyage. Heureusement qu'on s'est débarrassés de FTX, avant que ça ne devienne encore plus gros ! »

Elle perçoit encore de grands potentiels pour les cryptomonnaies et la blockchain, qu'elle considère indissociables : « La blockchain, c'est un triptyque : un registre, parce que c'est une base de données ; un réseau, parce que c'est un registre maintenu par un réseau ; et une unité de compte, car il faut que le réseau soit rémunéré pour maintenir le registre. Sinon, personne ne travaille gratuitement. »

La pertinence des cryptomonnaies n'est peut-être pas évidente dans nos pays développés et stables, selon elle, mais elles se révèlent utiles dans des Etats « où il y a une vraie rupture de confiance entre les citoyens et les systèmes politiques et monétaires, notamment en Amérique centrale ».

L'inconnue des taux hauts

Dans les économies plus constantes, les blockchains (particulièrement Ethereum ou ses déclinaisons) pourraient aussi fluidifier des transactions financières actuellement ralenties par une foultitude d'intermédiaires. Difficile cependant de savoir comment les cours se comporteront alors que les cryptomonnaies n'ont jamais connu un environnement de taux d'intérêt élevés.

« Je pense que les banques centrales ont une responsabilité dans la formation de la bulle, remarque l'économiste Jézabel Couppey-Soubeyran. L'amplification de la bulle était largement liée à la politique monétaire qui a été conduite depuis la crise financière de 2008. Les banques centrales ont déversé énormément de liquidités sur les marchés, à travers des opérations d'achat de titres, et ces liquidités se sont ensuite déplacées, en particulier dans des cryptoactifs. »

Que la crise soit passée ou non, les blockchains ont encore de l'avenir. Sommes-nous à l'abri d'une nouvelle bulle et des excès qui vont avec ? Les Etats s'emploient à l'éviter, mais nul ne sait s'ils y parviendront.

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