Bercy veut inciter les Français à dépenser leur épargne

Bercy veut inciter les Français à dépenser leur épargne
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L'une des pistes serait d'assouplir la fiscalité des droits de donation pour encourager la transmission de patrimoine intergénérationnelle.

Bercy veut inciter les Français à dépenser leur épargne
Crédit photo © Reuters

Le serpent de mer de l’aiguillage de l’épargne des Français revient sur le devant de la scène politique. Les milliards d’euros accumulés par les ménages sur leurs comptes et livrets bancaires depuis l’arrivée du coronavirus attirent les convoitises.

Entre un déficit public largement creusé par les mesures de soutien et tout un pan de l’économie terrassé par les restrictions sanitaires, les besoins en cash sont au centre des priorités des pouvoirs publics qui planchent sur la façon de tirer parti de cette manne financière.

Pour le gouvernement, il y a urgence économique : le surcroît d’épargne qui "dort" sur les livrets des Français doit participer à la relance en étant redirigé vers l’appareil productif - d’autant que cette sur-épargne est amenée à progresser significativement cette année. Selon les prévisions de la Banque de France, elle pourrait encore doubler ces dix prochains mois pour atteindre la modique somme de 200 milliards d’euros à fin 2021.

Inégalités patrimoniales

Mais il y a aussi urgence sociale : la crise a accentué la précarisation des foyers modestes (familles monoparentales, immigrés, étudiants en particulier) et le creusement des inégalités, tandis que beaucoup de ménages restent dépendants des mesures de soutien exceptionnelles pour l’emploi.

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Politiquement, le levier de la sur-épargne doit donc se coupler d’une tentative de meilleure redistribution des richesses : les jeunes comptent parmi les premières victimes de la crise sanitaire, dans un pays où ces vingt dernières années, le patrimoine n’a eu de cesse de se concentrer entre les mains des plus riches et des plus vieux, et de s’amenuiser chez les plus pauvres et les plus jeunes, comme le montre un rapport de France Stratégie de 2017.

La tendance s’observe aussi dans le surcroît d’épargne dû au Covid : d’après le Conseil d’analyse économique, 70% de ce flux d’argent émane des 20% des Français les plus riches.

Epargne et relance

Alors que le débat s’anime chez les économistes, think tank mais aussi dans les rangs de l’opposition au Sénat, Bercy a décidé de reprendre la main sur le sujet. En marge d’un point presse la semaine dernière, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a déclaré qu’il souhaitait présenter dans les prochains mois « un dispositif pour assurer que l’épargne des Français va bien à la relance de l’activité économique et aux entreprises françaises ».

Celui-ci pourrait notamment passer par « un système incitatif […] de transferts ou de dons entre générations » - une information non confirmée par le ministre de l’Economie au Parisien, qui a en revanche assuré que la sur-épargne des Français ne serait pas taxée.

Bercy semble donc vouloir d’abord s’attaquer à la redistribution générationnelle en laissant pour l'instant de côté, la question, beaucoup plus impopulaire, des droits de succession.

Vers un assouplissement des droits de donation ?

Après avoir été durcie sous les présidences Sarkozy et Hollande, la fiscalité des droits de donation pourrait donc à nouveau être assouplie afin d’encourager les seniors à soutenir davantage les générations suivantes.

Aujourd’hui, l’exonération des droits de donation est limitée à 100.000€ pour les enfants, et à 31.865€ pour les petits enfants. Au-delà de ces montants, les donations sont imposables selon un barème progressif.

Ces abattements sont renouvelables tous les 15 ans et cumulables avec celui réservé aux dons familiaux de sommes d’argent en espèces, défiscalisés à hauteur de 31.865€, à la condition que les donateurs aient moins de 80 ans, et que les bénéficiaires soient majeurs ou émancipés.

Le Cercle de l’Epargne suggère par exemple en ce sens « de transmettre en franchise de droits aux enfants ou petits-enfants [des sommes] dans la limite de 50 000 ou 70 000€. De manière plus globale, il faudrait peut-être revenir à la règle des 10 ans et non des 15 ans en ce qui concerne l’application des abattements pour les donations. » Des mesures pourraient également être imaginées en cas de transferts qui viseraient à faciliter l’achat de la résidence principale ou la création d’une entreprise par les enfants ou les petits-enfants, propose le think tank.

A noter que le gouvernement avait déjà fait un premier geste en ce sens l’été dernier, en offrant jusqu’au 31 juillet 2021, une exonération supplémentaire exceptionnelle de 100.000€ pour les dons d’argent à un enfant, petit-enfant ou arrière-petit-enfant si les sommes reçues sont destinées à la construction d’une résidence principale, à des travaux de rénovation énergétiques ou à la création-développement d’une PME.

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