« Savoir aménager son régime matrimonial avec des clauses sur mesure »

« Savoir aménager son régime matrimonial avec des clauses sur mesure »

Nicolas Minard, dirigeant de I.C.E. Finance

« Savoir aménager son régime matrimonial avec des clauses sur mesure »
Crédit photo © ICE Finance

Il est un souhait fréquemment partagé par une clientèle patrimoniale, celui de protéger son conjoint survivant… Des espérances de vies qui ne cessent de s’allonger additionnées à un coût probable de la fin de vie (dépendance et perte d’autonomie) en sont souvent les motivations personnelles. Dans d’autres cas, il peut s’agir de défiances ou rancœurs à l’égard des enfants, communs ou pas.

De nombreux outils juridiques, légaux ou développés par la pratique notariale permettent d’atteindre cet objectif. En la matière et selon les statistiques, le régime de la communauté universelle avec attribution intégrale, réputée pour être simple, efficace et pour sa protection maximale, semble avoir le vent en poupe.

Premier outil : la communauté universelle

La communauté universelle, c’est du radical puisque tout devient commun. Il s’agit de la première étape. Pour arriver à ce résultat impressionnant, chaque époux doit réaliser un apport à la communauté de ses biens propres (définis comme tels par la loi). Cette série de clauses d’apport à la communauté (aussi appelée clauses d’ameublissement) permet ce changement de «camp».

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  • Première remarque : tout devient commun…enfin presque… Les biens reçus par donation par un des époux, alors même que le donateur (souvent un parent) avait prévu une exclusion de communauté empêchent l’entrée en communauté.
  • Deuxième remarque : les biens propres par nature (vêtement et linges, indemnité perçue en réparation d’un préjudice corporel, certains contrats retraite, les primes jeunes agriculteurs…etc..) sont exclus de la communauté universelle.
  • Troisième remarque : tout devient commun, très bien, mais quid en cas de perturbation conjugale ? La communauté se liquidera avec un 50/50, y compris sur les anciens biens propres !

Il serait primordial de prévoir une clause de reprise des apports en cas de divorce afin que la générosité ne soit opérée que dans le cas du décès et non celui du divorce.

Deuxième outil : l’attribution intégrale

Après que tout soit devenu commun par apport à la communauté (avec les limites et réserves observés plus haut), tout sera attribué au survivant de la communauté. La protection est alors maximale. On entend souvent dire qu’il n’y aura pas d’ouverture de succession au premier décès. Le conjoint survivant appréhende alors tout et en pleine propriété.

  • Première remarque : Tout…enfin presque… Si le défunt avait ouvert et alimenté des contrats d’assurance vie à son nom, le contrat sera alors dénoué et le capital sera versé aux bénéficiaires. Le régime matrimonial n’aura alors pas d’influence sur le choix du souscripteur assuré.

Il semble important de privilégier des souscriptions conjointes avec un dénouement au second décès. Si ce n’est pas possible, une attention particulière devra être portée à la rédaction de la clause bénéficiaire.

  • Deuxième remarque : Le conjoint survivant a tout et les enfants n’ont rien. Ils devront attendre le « second round ». Avec l’évolution des familles recomposées, il se peut cependant que les enfants du défunt (mais pas du conjoint survivant) n’y soient pas invités.

Cet enfant non commun pourrait donc demander que soit réduit l’avantage matrimonial (cela s’appelle l’action en retranchement) afin d’appréhender sa part.

Sur les enfants communs, l’avantage matrimonial est une «arme absolue». Ils ne pourront donc pas contester le choix de leurs parents en demandant l’application de l’action en retranchement. Ils auront ce qui reste (risque inhérent au syndrome de la veuve joyeuse n’étant pas à exclure, ou du veuf joyeux, parité oblige, mais il faut avouer que cela reste moins crédible).

Les enfants communs auront aussi la joie d’apprendre qu’ils auront perdu l’abattement de 100.000 € par parent et par enfant dont ils auraient pu bénéficier au premier décès.Il est fortement conseillé de réfléchir à coupler l’aménagement du régime matrimonial à une stratégie de transmission pour ne pas perdre cet abattement.

  • Troisième remarque : Le conjoint survivant a tout…mais dans certains cas, n’est-ce pas trop ?

Détenir, c’est aussi souffrir

Appréhender des biens immobiliers, des parts de sociétés, des titres, des liquidités en pleine propriété cela va certes assurer à la fois le cadre et le niveau de vie du conjoint. Mais est-ce prévoir sa qualité de vie ? Car dans certains cas, détenir c’est souffrir… En effet, il faut prendre en compte que le conjoint va devoir gérer seul la totalité de ces biens de communauté. Il ou elle devra voter au syndicat de copropriété, s’occuper des locataires ou encore de l’allocation d’actif dans un monde de taux négatifs…

A noter que l’attribution intégrale n’est pas obligatoire. Il peut, en lieu et place être par exemple prévu que le conjoint puisse prélever, avant tout partage de l’actif de communauté, tel ou tel bien, en pleine propriété ou en usufruit (clause de préciput). Le conjoint pourrait alors configurer sa protection en fonction de ses besoins et envies au jour du décès.

Enfin, il faut aussi prendre en compte que chaque client est différent et chaque composition familiale l’est aussi, c’est pourquoi le conseil «sur mesure» semble être déterminant en la matière.

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Nicolas Minard

Le parcours de Nicolas Minard

Dirigeant, I.C.E. Finance

Nicolas Minard est conseiller en gestion de patrimoine indépendant au sud de Limoges. Doté d’une expérience bancaire de 16 ans au sein d’un grand groupe régional, il est double diplômé en gestion de patrimoine et ingénierie patrimoniale du chef d’entreprise auprès de l’université de Clermont-Ferrand. Il est spécialisé dans le conseil en stratégie patrimoniale et dans le courtage en financement pour une clientèle internationale.

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