Rachats sur assurance-vie : des calculs aux airs de casse-tête

Rachats sur assurance-vie : des calculs aux airs de casse-tête

Le nouveau cadre fiscal ne va pas simplifier les calculs pour les contrats alimentés avant et après la réforme. Explications…

Rachats sur assurance-vie : des calculs aux airs de casse-tête
Crédit photo © Creative Commons / Ken Teegardin

La règle est désormais simple… du moins a priori. Lors d’un retrait sur un contrat d’assurance-vie de moins de 8 ans, la fiscalité applicable dépend de la date des versements. Si les versements ont été faits avant le 27 septembre 2017, les gains sont imposés à 35% (contrat de moins de 4 ans) ou à 15% (de 4 à 8 ans). Si les versements sont postérieurs à cette date, les gains sont soumis au taux du prélèvement forfaitaire unique, soit 12,8%.

Mais que se passe-t-il si un même contrat a été alimenté avant et après le 27 septembre 2017 ? Là encore, à première vue, la réponse est simple. Le contrat subit une imposition à deux vitesses. Reste que dans la pratique, les choses ne sont pas aisées à mettre en place.

Exemple

Prenons un exemple pour illustrer cette complexité. Un épargnant a un contrat de moins de 4 ans et a versé 50.000 euros en 2016. Ce versement a généré 25.000 euros de gains. Fin 2017, il a reversé 20.000 euros sur son contrat et a ici obtenu 5.000 euros de gains.

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Au total, son contrat est donc valorisé 100.000 euros, dont 70.000 euros de versements (70%) et 30.000 euros de gains (30%).

Exemple de contrat alimenté par plusieurs versements
L'Argent & Vous
Versement 1 (2016)Versement 2 (fin 2017)Ensemble du contrat
Capital versé50.000 €20.000 €70.000 €
Produits associés25.000 €5.000 €30.000 €
Total75.000 €25.000 €100.000 €

Imaginons que cet épargnant souhaite procéder à un rachat partiel de 20.000 euros. La première étape consiste à déterminer la part de ce rachat qui sera imposée.

Etape 1 : calcul du montant taxable

Comme le précise la règle fiscale, le rachat doit comporter les mêmes proportions de gains et de capital que le contrat dans son ensemble.

Autrement dit, dans notre exemple, le rachat comportera 30% de produits (6.000 euros) et 70% de capital (14.000 euros), afin de respecter la règle fiscale.

Jusqu’ici les choses sont assez claires. Elles se compliquent en revanche lorsqu’il s’agit de déterminer quelle fiscalité doit s’appliquer.

Etape 2 : détermination de la fiscalité applicable

Une distinction étant désormais faite entre les différents versements (et les produits attachés), on peut donc se demander sur quelle partie du contrat porte le rachat. Doit-on considérer que le rachat porte sur le plus ancien des versements (et ses gains) avec une taxation à 35% ? Pourrait-on au contraire décider de racheter en priorité le versement récent pour bénéficier d’une fiscalité allégée à 12,8% ?

L’une ou l’autre de ces solutions conduirait à une incohérence. Le versement le plus récent (25.000 euros avec les gains) suffirait par exemple à couvrir un rachat de 20.000 euros. Mais la part de gains (5.000 euros) ne correspondrait pas au gain taxable calculé précédemment (6.000 euros).

Ceci tient au fait que la ventilation entre versements et gains n’est pas la même si l’on regarde l’ensemble du contrat (70/30 dans notre exemple) ou un versement précis (20/80 pour le second versement).

La seule manière d’obtenir un résultat cohérent serait donc de faire porter le rachat sur les différents versements en fonction de leur poids dans le contrat.

Etape 3 : calcul de l’impôt

Dans notre exemple, le versement 1 (avec ses produits) représente 75% du contrat. Il devrait ainsi contribuer au rachat à hauteur de 75%, le reste provenant du versement 2.

Le rachat comporterait dès lors 15.000 euros provenant du premier versement (dont 10.000 euros de versement et 5.000 euros de gains). Le versement 2 serait quant à lui « racheté » à hauteur de 5.000 euros (dont 1.000 euros de gains et 4.000 euros de capital).

Au total, il y aurait bien 6.000 euros de gains et 14.000 euros de capital dans le rachat, soit une proportion de 70/30, conforme à celle du contrat dans son ensemble.

Les 5.000 euros provenant du premier versement seraient taxés à 35% (1.750 euros) et les 1.000 euros à 12,8% (128 euros).

Pas de règle officielle à l’heure actuelle

Outre sa complexité, la méthode que nous avons retenue a un autre inconvénient : elle n’est pour l’heure qu’intuitive. De fait, aucune instruction fiscale n’est venue clarifier cette question des rachats partiels en indiquant une règle officielle de calcul. L’Argent & Vous a dès lors soumis ce cas à la DGFiP en début de semaine mais n’a pas encore eu de réponse.

Comme nous l’a indiqué un conseiller en gestion de patrimoine, « cette nouvelle fiscalité est incompréhensible et je ne suis pas certain que deux assureurs interrogés sur ce point apportent la même réponse. Les parlementaires ont voté cette nouvelle fiscalité sans voir les problèmes techniques induits ».

En résumé

Cet exemple montre la complexité de la fiscalité des rachats depuis la dernière réforme fiscale. Auparavant, seule l’ancienneté du contrat importait. Il suffisait donc de calculer la part de gains au sein du rachat et d’appliquer le taux adéquat.

En introduisant un nouveau critère fiscal (la date des versements), le Législateur a changé la donne. Les assureurs sont désormais contraints d’identifier tous les versements et les gains associés puis de procéder (a priori) à une ventilation complexe en cas de rachat partiel.

Les ordinateurs risquent de chauffer, notamment pour les contrats alimentés par des versements réguliers.

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