« PLF et PLFSS 2020 : premiers décryptages »

« PLF et PLFSS 2020 : premiers décryptages »

Laura Aichelé, consultante patrimoniale pour la société de conseil Fidroit.

« PLF et PLFSS 2020 : premiers décryptages »
Crédit photo © Fidroit

Marronniers épineux s’il en est, comme à chaque fin d’année reviennent les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale de l’année suivante. Bien qu’encore en discussion, les projets actuels prennent forme et certaines tendances s’identifient clairement.

Baisse de l’impôt sur le revenu

Le gouvernement entend respecter ses engagements de juin dernier et abaisser dès le 1er janvier 2020 l’impôt sur les revenus. Une mesure qui devrait compenser la suppression de la réduction de 20 % applicable aux ménages modestes en vigueur depuis 2016, puisqu’à en croire l'exécutif, quelques 16,9 milliards de foyers devraient bénéficier de cette baisse du barème de l’impôt, pour un montant moyen de gain estimé à 303 euros par foyer. Les principaux bénéficiaires seront les contribuables soumis à une tranche marginale d’imposition inférieure à 30 %. Pour les autres l’effet ressenti sera quasi-neutre.

Les contribuables peuvent d’ores et déjà appréhender cette mesure grâce à un simulateur mis en ligne par l’administration fiscale.

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Ces modifications devraient être assimilées rapidement. En effet, les prélèvements à la source prendront en compte cette baisse dès le 1er janvier 2020 : il ne sera donc pas nécessaire de régulariser sa situation en septembre 2021. Toujours dans le but d’éviter une régularisation, le gouvernement a annoncé que les contribuables qui perçoivent une avance de 60 % sur leur réduction ou crédit d’impôt en début d’année (les investisseurs en Pinel sont un bon exemple) peuvent désormais la réduire ou la supprimer, notamment lorsque leur réduction arrive à terme.

Dans l’objectif d’aller toujours plus loin dans la logique de simplification fiscale, l'exécutif prévoit que les 12 millions de foyers fiscaux dont tous les revenus sont déclarés par des tiers, comme leurs employeurs, voient leur déclaration annuelle de revenus totalement automatisée à partir de mai 2021 (pour la déclaration des revenus 2020). Elle sera dès lors remplie et envoyée sans que le contribuable n’ait aucune démarche à faire. Ce dernier recevra, un mois avant la date limite de dépôt des déclarations, un document spécifique reprenant les éléments connus par l’administration et l’informant de cette dispense et pourra modifier les revenus déclarés en cas d’erreur.

Suppression progressive de la taxe d’habitation

Autre mesure phare du projet de loi de finances : la baisse et la suppression à horizon 2023 de la taxe d’habitation sur la résidence principale pour l’ensemble des contribuables. Dès 2020, les ménages modestes (ayant un revenu fiscal de référence de l’année précédente inférieur à 27 432 euros pour une personne seule ou 43 688 euros pour un couple) ne paieront plus de taxe d’habitation. Les autres en resteront redevables jusqu’en 2023 avec toutefois une exonération de 30 % en 2021, puis de 65 % en 2022.

Attention, certains ménages modestes qui ont bénéficié de la baisse de leur taxe d’habitation en 2018 et 2019, pourront avoir la mauvaise surprise de payer plein pot leur taxe d’habitation 2020 : les conditions d’octroi de ce dégrèvement sont réexaminées annuellement. Ce n’est pas parce qu’un contribuable aux revenus bas a bénéficié d’une baisse de sa taxe d’habitation en 2018, qu’il bénéficiera de la baisse de 65 % en 2019 et de la suppression en 2020. Les éventuelles hausses de revenus du contribuable, les possibles changements de situation personnelle, ainsi que les ressources du concubin ou du colocataire sont pris en compte.

Rappelons également que la suppression de la taxe d’habitation ne concerne que les résidences principales. Les résidences secondaires et les locaux vacants resteront taxables et ce même après 2023.

Renouvellement de la prime Macron

De son côté, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) prévoit que la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat baptisée « prime Macron », mise en place pour l’année 2019, soit renouvelée en 2020. Ses modalités restent quasiment inchangées : l’exonération d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales resterait limitée à 1 000 euros par bénéficiaire et concernerait les employés qui ont perçu une rémunération inférieure à trois SMIC annuels (soit un peu plus de 54 000 euros bruts pour 2020). Si l’année passée cette prime devait être versée entre décembre 2018 et fin mars 2019, cette année elle pourrait l’être jusqu’à fin juin 2020.

Une nouveauté majeure s’est cependant glissée dans cette nouvelle mouture : l’exonération serait désormais conditionnée à la mise en place d’un accord d’intéressement par l’entreprise, conclu au plus tard au jour du versement de la prime. Un élément qui ne satisfait pas le patronat et qui risque donc de réduire le nombre d’entreprises volontaires.

Simplifications dans le secteur de l’emploi à domicile

Les particuliers qui ont recours à des prestations de services à la personne (ménage, garde d’enfants, soutien scolaire, assistance aux personnes handicapées, etc.) devraient, à l’avenir, percevoir les aides financières auxquelles ils ont droit (crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile, allocations personnalisées d’autonomie…) en temps réel, dès le versement de la rémunération à leur salarié. Il n’y aura donc plus de décalage entre le moment où la dépense est réalisée et celui où les aides sont perçues (actuellement un an après pour le crédit d’impôt, selon un calendrier variable pour les autres aides).

Avant d’être éventuellement progressivement adoptée sur l’ensemble du territoire, cette mesure serait expérimentée pendant deux ans dans deux départements seulement (a priori ceux du Nord et de Paris).

En 2020 les choses vont également se simplifier pour les salariés à domicile puisqu’ils seront soumis au prélèvement à la source à compter du 1er janvier. Ces prélèvements seront effectués par les organismes Cesu et Pajemploi et non par les particuliers directement. Afin de leur éviter un double prélèvement en 2020 (prélèvement à la source à compter du 1er janvier 2020 et paiement de l'impôt sur les revenus de 2019 en septembre 2020), le solde d’impôt pourra être étalé entre septembre 2019 et décembre 2021 s’il est trop important.

Allégement des déclarations des indépendants

Le gouvernement prévoit en outre d’alléger les obligations déclaratives des travailleurs indépendants en fusionnant leurs déclarations fiscales et sociales. Cette fusion se déroulerait en deux temps.

En mai 2020, au moment de la déclaration des revenus 2019, celle-ci serait pré-remplie à partir des déclarations fiscales professionnelles du travailleur indépendant, mais ce dernier devrait toujours effectuer sa déclaration sociale annuelle. Ce n’est que lors de la déclaration des revenus 2020 (déclarés en mai 2021) que les URSAFF devraient exploiter directement les données de la déclaration fiscale personnelle pré-remplie pour établir l’assiette sociale.

Transformation du CITE en prime

Les contribuables réalisant des travaux d'isolation de leur habitation principale ou des dépenses pour la rendre moins énergivore bénéficient aujourd’hui du crédit d’impôt transition énergétique (CITE). Il permet, en contrepartie de la réalisation de ces travaux énergétiques, de réduire son impôt.

À compter de 2020, ce crédit d’impôt, jusqu’alors ouvert à tous, devrait être remplacé par une prime forfaitaire qui ne serait accordée qu’aux seuls ménages modestes (ménages dont le revenu fiscal de référence n'excède pas certains plafonds - 24 918 euros pour une personne seule résidant en Île de France). Les ménages intermédiaires continueraient à bénéficier du crédit d’impôt en 2020, mais certaines dépenses (comme les chaudières au gaz à très haute performance) ne seraient plus éligibles. Ces ménages intermédiaires pourraient bénéficier de la prime à compter de 2021 mais pour des montants moindres que les ménages modestes.

Quant aux ménages les plus aisés, ils ne bénéficieraient ni de la prime, ni du CITE à compter du 1er janvier 2020 (sauf en cas d’installation de système de recharge pour véhicules électriques).

Suppression du système de l’étalement

Mauvaise nouvelle pour les retraités ! Aujourd’hui, les salariés qui partent en retraite peuvent bénéficier d’un régime d’imposition spécifique afin de limiter la progressivité de l’impôt et surtout d’étaler le paiement de l’impôt dû sur leurs indemnités de départ à la retraite. Ce régime s’applique également, et de manière plus générale, aux droits transférés d’un compte épargne temps sur un plan d’épargne salariale et à l’indemnité compensatrice de préavis.

Le projet de loi de finances prévoit de supprimer ce régime à compter de 2021 (pour les revenus de 2020). Cependant, les contribuables qui ont déjà opté pour ce régime continueraient à en bénéficier jusqu’à la dernière année de l’étalement prévue initialement.

À l’avenir, les contribuables pourraient toujours utiliser un autre régime dérogatoire, le système du quotient, s’ils souhaitent limiter la progressivité de l’impôt mais ce mécanisme ne leur permettra plus d’étaler dans le temps le paiement de l’impôt.

Utilisation des données internet par l’administration fiscale

Il semble, pour finir, que l’administration fiscale évolue avec son temps et que la maxime « Pour vivre heureux, vivons cachés » va devenir particulièrement d’actualité dans les prochains mois. Les contrôleurs fiscaux pourraient à l’avenir, à titre expérimental sur une période de trois ans, collecter et exploiter les informations librement publiées sur Internet et les réseaux sociaux. Le but étant de lutter contre la fraude fiscale et de constater d’éventuels défauts de déclaration (comme par exemple la publication de photos de vacances aux Seychelles alors que peu de revenus sont déclarés, l’absence de déclaration de la vente d’un bijou de famille sur Leboncoin, la localisation des photos différente de celle de la résidence fiscale etc.). Une manière de procéder qui inquiète cependant la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) qui a d’ores et déjà émis certaines réserves et estime qu’il serait nécessaire de préciser les contours du dispositif envisagé...

Pour aller plus loin et en savoir plus sur la fiscalité en 2020.

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Laura Aichelé

Le parcours de Laura Aichelé

Consultante patrimoniale, Fidroit

Laura Aichelé est consultante patrimoniale pour la société de conseil en organisation patrimoniale Fidroit. Elle est diplômée du Master 2 Gestion de Patrimoine de Clermont-Ferrand.

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