Epargne salariale solidaire : l'encours progresse, mais "il y a encore du travail"

Epargne salariale solidaire : l'encours progresse, mais "il y a encore du travail"

Sophie des Mazery, Directrice de l'association Finansol, fait le point sur l'épargne salariale et la part "solidaire" de ces investissements.

Epargne salariale solidaire : l'encours progresse, mais "il y a encore du travail"
Crédit photo © Reuters

Le premier semestre est le moment propice pour les salariés qui décident de s'occuper de leur épargne d'entreprise. Les FCPE leur permettent de placer leur intéressement, leur participation ou leur abondement, et depuis janvier 2010, les entreprises ont l'obligation de proposer au moins un fonds dit "solidaire". De quoi faire progresser l'encours de ce type de produit, avec une accélération ces derniers mois. Entretien avec Sophie des Mazery, la directrice de l'association Finansol.

A combien s'élève actuellement l'encours de l'épargne salariale solidaire ?

Sophie des Mazery : Au 30 juin 2013 l'encours s'élevait à 3,2 milliards d'euros, contre 2,6 milliards d'euros fin 2012. Il s'agit donc d'une progression très importante, qui s'explique par le nombre croissant de Français qui investissent sur ce type de fonds. Les mesures de déblocage temporaire de l'épargne salariale, décidées par François Hollande sur 2013 pour relancer la consommation, ne concernaient pas les fonds solidaires. Ce dispositif n'a donc pas pesé, et d'ailleurs, il a globalement mal fonctionné auprès des épargnants qui ont très peu retiré.

D'après les chiffres de la Dares, l'encours pour l'épargne salariale dans son ensemble s'élevait en juin 2013 à 98,6 milliards d'euros, la part du "solidaire" reste donc confidentielle ?

Sophie des Mazery : Il y a en effet encore du travail, et pour l'épargne solidaire en général, puisqu'à terme notre objectif est que 1% du patrimoine financier des Français soit investi en "solidaire", alors que nous sommes actuellement à 0,12%. La part du solidaire dans les fonds d'épargne doit encore progresser, en valeur absolue, elle est faible, mais il est intéressant de regarder les taux de progression, avec une croissance de 50% sur 2012, et d'environ 20% depuis le début de 2013.

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Combien de salariés ont opté pour l'épargne salariale solidaire ?

Entre 10 millions et 12 millions de Français sont concernés, un chiffre variable d'une année à l'autre. Depuis le 1er janvier 2010, toutes les entreprises de plus de 50 salariés qui proposent de l'épargne salariale doivent proposer au moins un fonds solidaire.

La crise a-t-elle eu un effet sur les comportements ?

Sophie des Mazery : On estime le nombre d'épargnants solidaires entre 800.000 et un million, en sachant que 80% sont des salariés. La crise a mis en lumière qu'il existait des dérives très importantes dans le monde de la finance, et il semble que de nombreux épargnants se sont dit qu'ils voulaient redonner du sens à leurs placements. La loi sur l'épargne salariale solidaire a par ailleurs évolué, elle a donné un coup d'accélérateur, avec l'obligation pour les entreprises de proposer au moins un fonds solidaire.

Quelles sont les motivations de ces salariés ?

Ils veulent évidemment faire fructifier leur épargne, tout en donnant du sens à ce placement. L'épargne solidaire, depuis dix ans, a permis à 40.000 personnes d'être relogées. Elle a aussi créé 200.000 emplois, via le financement de 100.000 entreprises. A l'heure où de nombreux Français s'inquiètent de la montée du chômage, ces chiffres ont un sens. Les épargnants qui font ce choix vont soutenir des projets à forte utilité sociale ou environnementale, tels que l'accès à l'emploi et au logement, ou le développement de l'entrepreneuriat dans les pays du sud. Les entreprises qu'ils vont aider doivent aussi afficher une lucrativité limitée, des rémunérations raisonnables, une gestion transparente, et avoir une activité non délocalisable.

Quelles sont les actions solidaires privilégiées par les entreprises qui proposent un fonds à leurs salariés ?

Sophie des Mazery : Certaines entreprises choisissent de faire de ces fonds un vecteur de leur politique de cohésion interne. C'est le cas par exemple de Schneider Electric, qui incite ses salariés à placer leur épargne sur un fonds solidaire qui doit financer des projets d'accès à l'énergie des plus pauvres dans le monde. Il y a aussi des entreprises comme Carrefour ou la Saur qui sont dans une logique diversifiée, avec des FCPES qui vont développer de l'activité sur leurs territoires d'implantation.

Quel sont aujourd'hui les freins au développement de l'épargne salariale solidaire ?

Sophie des Mazery : Il faut convaincre les dirigeants d'entreprise de mettre en avant ces produits, mais il faut aussi mieux informer les salariés. Il faut leur donner une vision précise du sens de cette épargne, qu'ils comprennent à quoi va servir cet argent. Nous avons pour cela publié un guide, qui permet de comprendre les clefs de l'épargne salariale solidaire. Il existe des fonds d'épargne solidaire actions, diversifiés, obligataires... tous les profils existent. Dans l'esprit des Français, l'association des mots "finance" et "solidarité", amène souvent à croire que l'opération ne sera pas rentable. Il faut battre ces idées-reçues. Quand on compare les performances d'un fonds solidaire et d'un fonds classique, elles sont très comparables, et cela dépend avant tout de la qualité du gestionnaire.

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Sophie des Mazery

Le parcours de Sophie des Mazery

directrice, Finansol

A la tête de Finansol depuis 2010

Auparavant en poste au Crédit Coopératif (partenariats)

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