Benjamin Prod'homme, directeur associé d'Inter Invest Immobilier, et Hervé Franc, directeur du développement d'Inter Invest Immobilier
Le nouveau dispositif Denormandie permet de défiscaliser en investissant dans l’ancien. Constitue-t-il une bonne alternative au Pinel, dédié au neuf ?
H.F. Le Denormandie est une extension du Pinel aux biens anciens. Mais contrairement à ce qui a été fait précédemment, le Denormandie n’est pas soumis à un label énergétique. Les contraintes s’en trouvent donc allégées.
L’autre point important a trait au zonage. Jusqu’ici, on stimulait l’offre dans les zones tendues. Avec le Denormandie, le gouvernement cible des villes petites ou moyennes dans lesquelles le marché locatif est souvent moins dynamique.
C’est un élément essentiel à prendre en compte dans la réflexion car le locataire reste la clé de voute d’une opération immobilière.
Lorsque nous envisageons un projet neuf, nous faisons réaliser une étude du marché locatif en amont. Cela nous permet d’évaluer les perspectives de l’opération. Avec un Denormandie, il appartient à l’investisseur particulier de sélectionner lui-même la bonne ville et le bon produit.
Est-ce à dire que les deux dispositifs ne s’adressent pas aux mêmes profils ?
B.P. Exactement. Chaque produit a sa clientèle. Le Denormandie peut avoir de l’intérêt pour une personne qui souhaite investir près de chez elle et qui connaît bien le marché local.
Un investisseur qui ne bénéficie pas de cette proximité et/ou qui souhaite profiter d’un meilleur accompagnement prendra moins de risques en se tournant vers un Pinel.
En termes d’enveloppe, le Denormandie peut également apparaître plus accessible…
H.F. Le prix d’achat du bien n’est évidemment pas le même avec un Denormandie, mais le budget global n’est pas nécessairement plus faible.
Dans une ville intéressante comme Bayonne, un T3 neuf de 58 m² est proposé à 220.000 euros. Dans l’ancien, il faut débourser environ 170.000 euros pour un bien de même surface. Sachant qu’un Denormandie impose au moins 25% de travaux dans le prix de revient, que les droits de mutation sont plus élevés dans l’ancien et que des travaux de copropriété peuvent s’ajouter, l’écart n’est pas flagrant à l’arrivée même en intégrant l’avantage fiscal du Denormandie.
Selon nous, le choix du dispositif dépendra en premier lieu de la qualité du bien, du mix budget travaux/ rendement et des perspectives de revente….
La liquidité du marché peut être faible dans des petites villes éligibles au Denormandie. D’où encore une fois la nécessité de bien connaître et évaluer le marché local.
Certains observateurs estiment également que le Denormandie est parfois moins intéressant qu’une mise en location classique avec un éventuel déficit foncier, d’autant qu’il n’y a alors ni plafond de loyers ni plafond de ressources. Qu’en pensez-vous ?
H.F. Le Denormandie nous semble optimal pour les opérations intégrant 25% à 30% de travaux. Au-delà, il peut en effet être plus judicieux de recourir au déficit foncier.
La question des plafonds est en revanche un faux problème. Aujourd’hui, 90% des locataires sont éligibles aux dispositifs Pinel et Denormandie. Quant aux plafonds de loyers, ils sont très souvent proches des prix de marché, notamment dans les villes ouvertes au Denormandie.
La vraie question concerne surtout les risques de vacance ou d’impayé. A cet égard, quel que soit le dispositif, nous conseillons de passer par un gestionnaire. Cette solution a un coût mais elle apporte du confort et une vraie sécurité.
La question des niches fiscales, notamment dans l’immobilier, est revenue dans le débat récemment. Craignez-vous à terme une remise en cause de ces soutiens à l’investissement ?
B.P. On peut s’en inquiéter quand on entend les discours visant l’immobilier de manière récurrente. Cela constituerait toutefois une erreur dans la mesure où l’immobilier génère de l’emploi. En effet le secteur de la construction est l’un des principaux pourvoyeurs de travail en France.
L’immobilier est par ailleurs le seul investissement qui permet aux particuliers d’emprunter facilement pour se constituer un patrimoine en vue de financer un projet ou des revenus complémentaires lors du passage à la retraite. Cibler à nouveau l’immobilier enverrait un très mauvais signal alors que notre système de retraite ne permettra pas aux Français de conserver leur niveau de vie.